Forum - Le Chant des anges.

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Carlyle | 28/05/07 16:17

L'homme entra dans la taverne d'un pas hasardeux, comme s'il s'était déjà perdu dans les vapeurs d'alcool d'un autre estaminet d'où il avait été repoussé, et s'arrêta sur le pas de la porte un moment. Ses yeux, vagues, firent le tour de la salle, pour vérifier si, par hasard, personne n'était ici qui lui voulût du mal. Rassuré, il fit vraiment pénétrer ses hardes dans la pièce embrumée, et s'installa finalement à une table, pas trop loin de la porte, sans lui tourner le dos. Assit, enfin, il attendit que sa tête cessa de tourner sous l'effort, pour enfin beugler d'une voix rauque sa commande au bar.

Une heure plus tard, alors qu'il dormait sur la table avec l'apparence complète du coma éthylique, la porte fut poussée par quelqu'un qui n'aurait jamais dû se trouver là. Il entr'ouvrit un oeil, et continua à remâcher ses restes d'alcool. Le pire, c'est que l'autre se trouvait là pour lui. Il ne fit aucun signe, mais le copiste de talent se dirigea sur lui immédiatement.

« Carmickaël, j'ai ce que tu m'avais demandé. »

Il grogna, ou du moins essaya. Malheureusement, il ne rendit qu'une bulle de bave qui ne signifiait rien.

« Pas convaincu ? Le copiste tourna les yeux à droite et à gauche. Nous pouvons parler ? »

Nouvelle bulle de bave, puant un peu moins l'alcool.

« Regarde. »

Il ouvrit sa sacoche de cuir, et en tira une feuille à esquisse couverte de traits de plume très affûtés. Pas de doute. La piste était la bonne. Carmickaël gronda sourdement, et fouilla sous ses hardes, avant d'en sortir une bourse pleine d'or. L'autre s'en saisissait quand le saoul lui agrippa la main.

« Pas d'autres ?

-Je... je, fit l'autre apeuré, je te les donne toutes, je n'en veux pas ! Tu sais ce qui s'est passé à Trave !

-Précisément. Répondit Carmickaël d'un ton glacial. Plus d'autres ?

-J'ai brûlé mes croquis préparatoires.

-Dégage, va faire ta vie ailleurs. »

Le copiste ne se fit pas prier, et déguerpit à toute vitesse du bouge. Carmickaël plaça la sacoche entre ses jambes, sous ses haillons, et retourna à ses brumes. Aussi mit-il un petit moment avant de remarquer les deux hommes qui vinrent s'asseoir à sa table, quittant un comparse devant deux lourdes pintes de bière.

« Bonsoir Monsieur. M. Loup et moi-même avons à faire avec vous, pas vrai M. Loup ? Fit le premier, petit individu à tête de fouine.

-Pour sûr M. Aldemaar, pour sûr. Répondit la brute avec un sourire à couper net des haubans.

-Et donc, si vous pouviez avoir la gentillesse de bien vouloir accepter de répondre aux quelques questions que nous allons vous posez, je suis sûr que nous arriverons, au final, à un consensus des plus charmants qui permettra à tout le monde trouver son contentement dans nos échanges, n'est-ce pas M. Loup ?

-J'en suis convaincu M. Aldemaar, et la chaise grinça sous son poids.

-Aussi, c'est avec insistance que je me dois de vous demander sérieusement d'abandonner séance tenante votre alcoolémie trop importante pour nous parler, M. Loup se fera un plaisir de vous y aider.

-Cela sera un plaisir, M. Aldemaar.

-Pas la peine. Je peux discuter avec des types dans votre genre tout en cuvant ma bière, la fouine. Il leva un oeil distrait, et remarqua rapidement que leur acolyte partait.

-Oh, ce n'est pas très gentil, cela. M. Loup va en être choqué.

-Effectivement, je n'aime pas que l'on agresse verbalement mon partenaire, Monsieur. Fit l'autre avec un sourire crispé.

-Pas mes oignons. Voulez quoi ?

-Pour faire court, disons que nous avons assisté avec beaucoup de bonheur à la transaction que vous avez effectué vous-même avec un copiste assez renommé en cette ville, et étant un admirateur forcené des esquisses de ce grand maître, j'aimerai vous acheter la pochette de cuir qu'il vous a laissé.

-Non. Merci de bien vouloir me laisser dormir.

-M.Aldemaar n'a pas été assez clair, M.. Je suis moi aussi un esthète de l'art, et ces esquisses me tentent. Aussi allons-nous vous les acheter, à prix d'or.

-Non. Merci de bien vouloir me laisser.

-Monsieur, reconsidérez votre position, je vous en prie ! Cela nous éviterait des pourparlers interminables ! N'est-ce pas M. Loup ?

-Très exactement. Surtout, désagréables, nous sommes très durs et expéditifs en affaire.

-Moi également. Sur ce, je vous laisse messieurs. Ma position est ferme et définitive. Au déplaisir de vous revoir. »

Un léger silence plana sur la taverne le temps qu'il prit à sortir. Il avait oublié de dissimuler ses deux petits mètres dix, et deux fourreaux trop grands semblaient avoir brillés sous ses haillons. Ms Loup et Aldemaar se regardèrent longuement. Ils haussèrent les épaules, et, après une demi minute d'attente, lui emboîtèrent le pas.

Le calme de la rue n'était troublé que par les bruits du pas rapide de Carmickaël sur les pavés. Il avait cessé de jouer les hommes soûls. Cela ne servait plus à rien. Il conserva cependant sa cape de haillons. Pour surprendre un peu plus. La fouine et l'ours seront bientôt sur lui. Il s'engouffre dans une ruelle, se retourne, et attend

« Ne vous l'avais-je pas dit, M. Loup, que notre cher ami nous ferait l'insigne honneur de bien vouloir patienter ?

-Si, vous l'aviez dit, M. Aldemaar. Nous allons pouvoir négocier tranquillement. Il enleva et plia délicatement sa chemise et la posa sur le rebord d'une fenêtre, puis fit craquer les jointures de ses mains de bien indélicate manière.

-Qu'avons-nous négocié la dernière fois ? Quand était-ce, d'ailleurs ? Demanda Aldemaar.

-Qu'un aventurier nous remette une pierre. Pour un client. C'était... Il y'a huit mois. Avant. Il est mort. Tombe anonyme. Cimetière non consacré. La tête du moins.

-Oh, oui ! le reste n'était pas... présentable. Bref, Monsieur, soyez suffisamment intelligent pour vous éviter bien des tracas. Remettez-vous la mallette de cuir que vous portez là. Tout ira bien, et nous vous oublierons et disparaîtront de votre vie.

-Et si non ?

-Si non ? M. Loup, entendez-vous cela ? Joie ! Liesse ! Si non, malgré votre taille imposante, je puis vous assurer que vous ne ferez pas le poids. Il ricana désagréablement, des morceaux de porcelaines grinçant les uns contre les autres dans sa bouche..

-Laissez-moi seul juge de cela, voulez-vous ? » Répondit Carmickaël.

Il déposa la serviette de cuir derrière ses deux jambes, et enleva ses hardes, révélant une légère armure de cuir. Plus inquiétant, il révéla deux imposants fourreaux installés dans son dos.

Loup et Aldemaar esquissèrent des sourires de carnassier. Et tout alla très vite.

Loup fonça sans trop de tactique sur Carmickaël alors que la fouine disparut tout simplement. L'homme resta immobile, et tendit son poing vers la gauche, pour accueillir la figure d'Aldemaar d'un coup bien sonné, mais ne pû se faisant pas éviter la charge de Loup, beaucoup plus rapide qu'il ne l'avait prévu. Plié en deux, il expira bruyamment, et décocha un large coup de pied dans l'entrejambe de Loup qui hurla. Aldemaar, oublié jusque là, réussit à planter sa dague dans le genou de Carmickaël, mais pas à faire sauter la rotule. Loup se releva, et commença à agonir leur adversaire de coups excessivement puissants et excessivement bien placé. Carmickaël finit par s'effondrer à genoux, la tête brinquebalant de droite et de gauche. Il n'avait pas encore sortit ses lames.

« Je suis extrêmement déçu, M. Aldemaar, susurra Loup. Je croyais qu'il tiendrait plus longtemps que cela...

-Séchez vos larmes, M. Loup, fit son comparse joyeusement. Nous pouvons toujours le torturer à présent !

-Grande idée. »

Carmickaël releva la tête, et Loup et Aldemaar n'aperçurent son sourire qu'avec une demie seconde de retard.

Il posa les mains sur les gardes de ses deux épées à deux mains, et les sortit de leurs fourreaux respectifs en se relevant. Elles donnaient une lueur bleutée à la scène, et lui conféraient ainsi une atmosphère irréelle. Il les croisa devant son visage. Et alors les anges se mirent à chanter.

« Quel désappointement, M. Loup... Qui aurait pu nous annoncer que nous fussions ainsi vaincus ? » Enonça platement Aldemaar.

Un vague grondement lui répondit.

« Notre client ne va pas être content, M. Loup. Nous n'avons pas rempli notre mission. Inutile de grogner, je ne pouvais pas prévoir que nous tomberions sur un paladin pareil. Et vous non plus d'ailleurs. Bref. La question qui doit nous intéresser à présent est celle-ci : serons nous rétablit avant le lever du soleil, ou faudra-t-il tuer tous les badauds venus admirer notre régénération ? »

Carmickaël avançait dans les rues de la ville, la sacoche de cuir sous le bras, ses hardes sur le dos. Il boitillait insensiblement. Seul son maître d'arme aurait pu d'ailleurs le remarquer. Il grogna. Il avait croisé le cadavre du copiste, mais pas son assaillant. Il rentrait à son auberge. Le rapide regard qu'il avait jeté sur les dessins lui avait suffit. Il était clair qu'il se rapprochait de sa proie. Son maître, néanmoins, devait être mis au courant. Il s'arrêta soudainement en plein milieu de l'avenue et regarda la lune, en soupirant. Les anges, encore une fois, avaient chanté. Il était le droit, il était le juste, il était l'épée du destin, il était le traqueur. Et le chant des anges s'élèverait encore toutes les fois qu'il lui faudrait affronter les entreprises de Carlyle.

Carlyle | 28/05/07 16:18

Suite de :

1) Monologue oublié : [Lien HTTP]

2) Fragments epars : [Lien HTTP]

3) Séance inamicale : [Lien HTTP]

4) Eva : [Lien HTTP]

5) Vol de nuit : [Lien HTTP]

6) Les Minutes de la Confrérie Blanche : [Lien HTTP]

7) Orchestral manoeuvre in the dark : [Lien HTTP]

8 ) Echange et mots couverts : [Lien HTTP]

Edité par Carlyle le 28/05/07 à 16:18

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