Forum - [ Rp Commun : La Garde ] Sur La Table.

Dakeyras Dat Narumyr | 01/08/07 18:24

Sur la table, la place manquait. De nombreux parchemins se battaient avec des cartes, elles-mêmes envahies par des pions de marquage, des chopes plus ou moins vidées, une dague plantée dans le bois de la table... Une main gantée attrapa la dague et indiqua délicatement un point sur une carte jaunie par le temps. Sous la lame, un carré indiquait une ville. Les pointillés montraient des chemins, les traits des routes.
« Nous devrions passer par là. »
La voix était claire, semblait découler d'une décision réfléchie. Les autres Gardes réunis autour de la tablée pesèrent le choix. L'un d'eux hocha la tête. Un autre croisa les bras sur une poitrine féminine. Je les regardais un moment, silencieux. Dakeyras hocha la tête. Faites comme vous voulez, je vous demande juste de réussir, semblaient traduire ses yeux assombris. J'ai avancé le bras vers un contour, sur une autre carte.
J'avais été assez d'accord avec sa décision jusqu'à ce que je songe à éviter les ennuis. Ce que j'aurais fait dès le départ en temps normal. J'avais l'impression de me perdre un peu plus à chaque visite au Manoir. En face de moi, sur le mur, un miroir me renvoyait une image de moi plus sombre que l'originale. Plus que mon corps enrobé dans une cape noire, elle m'indiquait une nouvelle partie de mon esprit. Un caractère nouveau. J'ai frissonné. Miséricorde. Je me demandais si j'allais porter ce surnom longtemps.
« Ce serait le plus rapide en effet. » Ai-je dit.
Dakeyras a levé les yeux vers moi. J'ai poursuivi.
« Mais pas le plus sûr. Si notre employeur a besoin de nous, ce n'est pas par formalité. D'autres doivent être au courant de ce convoi. Passons plutôt par les collines. »
J'avais l'impression que ma voix sonnait faux. Comme si elle venait d'un criminel qui tente de se faire passer pour bon. J'ai dégluti discrètement.
Ils se sont penchés vers la nouvelle carte que je tirais du tas de parchemins. Sambre a lentement avalé une gorgée de ce qui me semblait être du vin. Le grand bureau du Manoir commençait à accumuler la poussière. Maintenant qu'il allait reprendre du service en même temps que la Garde, peut-être faudrait-il le remettre en état. Je souris à l'idée de voir un Oubli se coller à tout ce ménage.
« L'idée n'est pas mauvaise, Miséricorde, mais nous n'avons qu'un délai de trois jours, ne l'oublions pas. »
Je me suis redressé, conscient qu'on m'avait appelé par mon pseudonyme. Je ne m'y faisais pas totalement. Je l'ai encouragée à continuer, ce qu'elle a fait.
« Tu as raison, il nous faudra être sur nos gardes, mais nous avons des ordres clairs. Et si nous battre est le seul moyen de ne pas prendre un itinéraire détourné et trop long, alors nous nous battrons. Le contrat avant tout. »
Elle s'est tournée vers le maître du Manoir. Il a acquiescé. Son air montrait toujours le désir de mener la Mission à bien, quels qu'en soient les moyens. Etrangement, je me suis senti mieux quant à la décision prise. Je sentais au fond de moi une énorme envie d'en découdre avec qui voudrait s'opposer à la Garde de Dakeyras.
« Nous passerons par la route principale, ici, au Nord, puis passerons la nuit ici. » Dakeyras pointait sous le carré-ville précédemment désigné par Sambre. « Puis nous continuerons vers le Nord-Est jusqu'au port, comme indiqué dans le contrat. Et souvenez-vous, le client paye bien, mais ne veut aucune bavure. Chaque partie du chargement perdue ou endommagée devra être remboursée de notre poche, et donc réduite sur notre pactole final. »
Aux dernières paroles prononcées par Dakeyras, j'ai vu Synopsis s'agiter de l'autre côté de la table. Le fait de rembourser d'éventuels dommages ne semblait pas l'enchanter, tout comme chacun d'entre nous. Chacun semblait déterminé à faire un sans faute ; c'est pour ça que nous nous devions d'être infaillibles, parfaits, irréprochables. D'un air distrait, Synopsis, elle, faisait glisser inlassablement son index ganté sur un coin de la table, traçant une ligne vierge dans la fine couche de poussière. Le regard rivé sur un pichet en cuivre, comme je l'avais fait auparavant face au miroir, elle contemplait son visage enfoui dans le grand col sombre de sa tenue de Garde. Elle aussi devait apercevoir un reflet qui déformait sa réalité, la réalité telle qu'elle avait été jusqu'à présent. Puis elle s'est arrachée à la contemplation de cet étrange reflet et a pris la parole à son tour :
«Bien sûr que nous ne serons pas seuls. Et même si nous choisissons notre route avec soin, rien ne garantie la sécurité du trajet. Pourquoi ne pas placer l'un d'entre nous en avant du cortège ? Un Garde habillé banalement, chevauchant une lieue devant, qui pourrait repérer d'éventuels dangers. Le problème est de savoir comment le faire communiquer avec le reste des Gardes, en supposant qu'il détecte quelque danger.... »

Dakeyras Dat Narumyr | 01/08/07 18:25

Quant à Dakeyras, lui restait de marbre. Je le soupçonnais de nous observer finement afin de jauger notre potentiel dans de pareilles situations et de cerner davantage notre personnalité. Les pointes de ses doigts se touchant face à son visage formaient une barrière devant son regard. Son infime sourire, aussi froid qu'il pouvait être, montrait qu'il n'était pas déçu des décisions qu'il a prises nous concernant. Tous le regardaient et il s'est levé pour s'approcher de nous. Dans un mouvement il a rangé les parchemins en en faisant ressortir trois, il a pointé le premier du doigt. Il représentait un dessin de charrette légèrement transformée.
" Nous ne devrons protéger qu'une cargaison et son chauffeur. Aussi Il ne faudra qu'un groupe minimum autour de celle-ci pour ne pas éveiller les soupçons. Et donc, Sambre ta protection de brume ne fera qu'accroître les risques"
Sa main a alors glissé sur les feuilles vers un autre parchemin. Ce dernier lui représentait le chemin que nous prendrions durant deux jours et une nuit si tout se passait bien.
"La route est longue et même si nous suivons une des routes principales il faudra un éclaireur. Mais..."
Sa main a survolé à nouveau les feuilles et s'est arrêtée sur le troisième parchemin qu'il avait choisi. C'était la carte à laquelle j'avais fait référence, la seconde carte. Son doigts s'est posé sur le passage que j'avais indiqué plut tôt.
" Miséricorde a souligné un point précis, mais vous en avez fait abstraction, vous êtes passés au dessus. De ce chemin là, on pourra nous voir sur la grande route, même de nuit. Je doute que se soit le seul point du trajet où nous sommes visibles de loin. Aussi, en plus d'un éclaireur, il faudra un lâcheur, qui suivra l'escorte de loin afin d'éviter les poursuivants."
Il s'est redressé et est reparti vers son fauteuil en silence. Il restait debout. Il s'est tourné à nouveau vers nous.
" Sambre, vous serez l'éclaireur, comme prévu vous garderez le contact avec Synopsis qui restera dans la charrette. Miséricorde vous serez l'escorte visible du convoi, vous serez aux premières loges, c'est ce que vous vouliez, non ?."
Il y eut un long silence, le malaise s'emparait un peu plus de moi. Mon regard glissait d'une carte à l'autre sans mot. Puis Dakeyras a repris
"Je serai le suiveur, je serai peut-être accompagné de quelqu'un mais cela ne vous concernera pas et gênera encore moins."
Il nous a jugé alors les uns après les autres, il semblait jauger nos réactions. Puis, il a simplement ajouté :
« Allez-vous préparez. »
J'espérais fortement qu'on rencontrerait des ennuis, très fortement...

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La fleur noire occupait toute son attention. Il l'examinait avec délicatesse, précision, comme s'il avait voulu tout en connaître, tout ses détails, jusqu'aux plus incongrus, aux plus intimes. Il notait mentalement les nuances de couleurs, les tâches, les jeux entre l'obscur et le clair. Le vase en cristal était bel et bien la meilleure solution pour faire tenir une fleur pareille. Il la scruta encore un moment. Oui, cette fleur noire, isolée du bouquet, était parfaite. D'un geste plein de précautions, il l'ôta du réceptacle transparent, et coupa sa tige tout aussi cauteleusement. Il la tint à la lumière pendant un instant, vérifiant une nouvelle fois, et secoua sa tignasse brune. Parfaite. Il la rangea dans une des poches intérieures de sa veste, et s'approcha de la porte. Les voix murmuraient encore indistinctement, mais semblaient s'éteindre. Il s'adossa au mur, paisiblement, et attendit. Bientôt, à peine eût-il fermé les yeux et se fut-il assoupi quelques secondes, le battant s'ouvrit, et laissa passer un défilé de cape noire à capuche, indistincte, sans traits, sans rien, sans même de bruit, le sol de la pièce dont il sortait, protégé par un épais tapi, ne laissait rien feutrer. Il eut un sourire plein d'ironie. La quatrième silhouette, claudiquant et s'aidant de sa cane pour marcher, ferma la porte en sortant, et se tourna vers l'homme.

« Suivez-moi s'il vous plaît. » Fit-elle en commençant à s'éloigner.

Il la laissa filer un long moment. Une seule personne était habilitée à lui donner des ordres, et ce n'était pas elle. L'écho des pas se perdit dans les couloirs. Regardant une dernière fois les fleurs, en cherchant une plus belle encore, il disparut, et resta seul le vent.

Celimbrimbor | 06/08/07 14:27

Sympathiques considérations tactiques, sympathiquement décrites!