Forum - Intenerbisdhil - La queue du mercenaire

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Anastase De Mu | 18/07/15 16:43

« Dans la profondeur des ténèbres, je ne fais qu'un avec la peine, la douleur, le plaisir et l'extase. Au bord du précipice, je hurle et me libère des chaînes de la réalité, je rugis à la face du destin et lui impose ma volonté. Je suis le maître ici, celui qui provoque, celui qui ressent, celui qui crée. J'anime la matière onctueuse des rêves et je donne vie aux créatures de papier ; dans les ténèbres, mes doigts façonnent. »

« Le primotaure est un rude, Marquis. »

L'interpellé renifla de dédain. Il avait éprouvé quelques plaisirs à retrouver le vieux reître que les Rieurs avaient mis à son service sur Escaliburdhil ; mais à présent, ce flegme, ce visage rude et inexpressif, ces yeux plissés qui pouvaient contempler, sans cligner, un zombi dévorant le coeur frêle d'une petite lavandière innocente, tout cet homme revêche, engoncé dans sa carapace de cuir, lui tapait sur le système. Chaque lune, il soulevait le détail, par le menu, des grains de sables qui pouvaient, et qui iraient, se glisser dans la géniale mécanique des plans machiavéliques que le marquis s'évertuait à créer. Anastase devait se rendre à l'évidence. Les tortueux, sinueux, improbables chemins qu'empruntait son esprit retors se heurtait à la glaciale expérience d'un vieux combattant aguerri. Il aurait pu le faire égorger dans son sommeil, faire disparaître le corps, ou plaider l'accident de chasse. Mais le gaillard ne se laissait pas conter de jolis boniments ; il avait une mission, et il l'appliquerait, rappelant à l'elfe, inlassablement, que si l'on pouvait vendre sa liberté, on ne pouvait pas la racheter aussi facilement.

« La campagne se déroule à merveille. Nous avons encore percé ses défenses. Ces dégoûtants petits serpents adorent le sang. Qui l'eut cru ? On dirait de mignonnes petites couleuvres.
-Ils ne sont pas les seuls à distiller du venins, Marquis. Méfiez vous de vos alliés.
-Ne me prends pas pour un sot, l'ami. Bien sur, que je garde un oeil sur eux. Mais ils sont ici pour, l'or, la gloire, ou planter une vieille bannière mitée sur trois arpents de terres. Je vois plus loin. J'ai ceci. »

Le marquis souleva, bien en évidence, l'ouvrage qui avait précédemment occupé ses nuits. La moue du mercenaire montrait à quel point il méprisait les gens de la plume.

« Cette île a accueilli l'auteur de ce tas de papiers, mon gaillard. Et il raconte comment il a pu devenir l'un des plus puissants mages de la création.
-Mensonges et vantardises, tout simplement.
-Assurément un peu des deux. Mais certains détails ne trompent pas. »

Une ride soucieuse se dessina un instant sur le front si lisse de l'elfe. Il reprit, alors qu'elle disparaissait.

« La magie est naturelle, disaient les anciens. Elle est partout. Il suffit de voir les fils, et de jouer avec. Ce n'est pas donné à tout le monde. Mais la voie que trace ce sorcier est facile à suivre, pour qui veut se donner la peine.
-Du moment que l'on garde à l'esprit que l'or revient aux Rieurs, et les cochonneries de ce genre à notre bon marquis, gardez cela pour vous.
-Ah, tu as tord. Tord, tord, et encore tord ! Lorsque j'accéderai à ces arcanes secrètes, tu viendras me demander de racheter ton âme auprès des Rieurs. Mes pouvoirs seront immenses. Infinis. Gigantesques. Colossaux. Gargantuesques.
-Comme ma queue. »

Anastase haussa les épaules. Si le vieux condottiere s'en fichait pas mal, lui espérait bien pouvoir réussir son plan. Il feuilleta avec tendresse la couverture surannée, traçant du doigt, pour une énième fois, les volutes dorées qui l'agrémentaient. Pensivement, à demi-voix, il continua.

« Depuis le temps, l'ami, tu dois bien rêver de t'affranchir. De rompre ta laisse, et d'aller profiter de ton butin, paisiblement. Auprès d'une gourgandine. Ou de deux, non ? Tu dois être du genre à ne pas te satisfaire d'une seule prestation. Tu es un endurant, toi, un persévérant.
-Je suis déjà libre de le faire.
-Alors qu'est ce qui te retient ? Qu'est ce que tu fais encore dans mes pattes ? Je te ferai passer pour mort, si tu me débarrasses le plancher. Tu es comme une conscience insupportable qui contraint mon génie à des basses oeuvres indignes de ma personne.
-J'ai des plaisirs simples. J'aime tuer des gens. »

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Anastase de Mù, le marquis.

"Mon cher ami, ce crâne de gobelin siamois est magnifique ! Votre prix sera le mien."

Edité par Anastase De Mu le 18/07/15 à 16:45

Behaine | 19/07/15 17:06

« Dans les profondeurs de mon livre de compte, je ne fais qu'un avec les chiffres. Mes yeux parcourent le registre en diagonale, habitués, experts, et repèrent les imperfections, les virgules douteuses, les pourcentages abusifs. Je n'ai pas d'ennemis, seulement des clients, et dans l'ombre, mes marchandises bâtissent ce Dhil. »

« Les pièges sont en place, marchand. »

L'interpellé haussa les épaules, indifférent. Il avait beaucoup d'estime pour le général. Il ne le connaissait pas beaucoup, pas personnellement, mais avait pu être témoin de certains de ses exploits. Il avait été honoré quand il avait accepté de se joindre à lui sur Intenebrisdhil. Mais à présent, sa stature trop droite, son air contrarié et sa cicatrice, sur sont front, qui n'était rien d'autre qu'un message à tous les hommes qui ne sont pas des soldats : vous êtes tous des couards, bien proprets derrières vos murs d'enceinte. Chaque lune, il mettait le doigt sur une faille dans l'organisation que le marchand s'évertuait à créer. Il était ce que Behaine n'était plus : un guerrier, un vétéran, et il continuerait à lever les yeux au ciel à chaque fois que le nain prendrait une décision qui irait dans le sens du profit direct, sans soucis aucun pour la sécurité ou la défense de la cité.

« Les affaires se portent à merveille. Les caravanes circulent par dizaines, pleines de ce que ce continent de demande qu'à être : un lieu luxuriant et... Luxueux. Nos chasseurs de géants font fureur, et bientôt pas un seul de nos services ou produits ne sera pas réclamé par quelqu'un.
-Méfiez-vous, Sieur, vous n'avez pas que des alliés.
-Ne me prends pas pour un pigeon. Je sais que tous ne sont pas encore mes clients. Tes pièges sont là pour ça. Mais si tu veux mon avis, ils sont ici pour s'étriper entre eux. Qu'auraient-ils à gagner à attaquer une cité comme la notre ? Tout notre or est immédiatement réinvesti ou transférés à nos amis. Ce serait prendre un gros risque, et faire couler beaucoup de sang pour finalement pas grand chose. Les plus malins d'entre eux savent très bien qu'il vaut mieux être le client d'un marchand plutôt que son ennemi.
-Tous ne sont pas malins. »

Le marchand rit de bon coeur. Il hocha la tête. Il devait bien concéder cela. Il se retourna vers son général et lui montra le lourd registre, posé sur ses genoux.

« Mais nous si. Enfin, j'essaye de l'être. Ce bouquin consigne toutes les transactions qu'ont effectué des centaines de marchands avant moi. De quoi devenir infiniment riche, pour peu que l'on sache en tirer les leçons adéquates.
-Rien que des chimères, si vous me le permettez. De quoi vous rendre aveugle.
-C'est probable, oui. Mais certains détails ne trompent pas. »
Le nain tourna plusieurs pages, un peu au hasard, et yeux recommencèrent leur danse folle, suivant des lignes entremêlées qu'un novice aurait pu prendre pour des symboles magiques. Il ne les en détacha pas lorsqu'il reprit la parole.
« Le commerce est le plus vieux métier du monde. Dès qu'on a sur faire quelques choses de nos dix doigts, nous avons instantanément compris que ce que nous avions entre les mains avait une certaine valeur. Si tu connais cette valeur, et que tu joues avec, alors tu peux devenir quelqu'un de véritablement puissant.
-Je n'en vois honnêtement pas l'intérêt.
-Tu as tord. Tord et retord. D'ailleurs, ce ne doit pas être totalement honnête, comme tu le dis, puisque tu es général. Tu es quelqu'un de puissant, j'imagine que tu le sais et que tu t'y ai fais, depuis le temps. »

Le général haussa les épaules. Il feignait l'indifférence, mais Behaine sentait une raison sous jacente. Une raison d'être à ce poste haut placé. Une raison de le suivre. Une raison d'être venu sur Intenebrisdhil avec lui. Il décida de lui rentrer dedans franchement.

« Alors pourquoi être général ? Pourquoi m'accompagner ? Pourquoi bâtir cette cité, protéger mes convois ? Me déranger quand la ronde des sentinelles n'est pas suffisamment optimisée ? Je ne te paye même pas. Je veux dire, tu pourrais me laisser, et cela ne ferait que rendre mes études de marché plus silencieuses.
-J'ai des principes simples. Je n'aime pas que des gens soient tués.»

[Copyright Anastase de Mù]

[Ç'aurait sans doute été plus lisible avec les dialogues en gras, mais je n'ai pas réussi la manip']

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Behaine, ex-marchand. Décédé.

Edité par Behaine le 19/07/15 à 17:10

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