Forum - [RACEODHIL III] L'homme loup se battra pour les elfes

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Lunaire Pourprerage | 06/06/15 14:52

Lunaire. Raceodhil.

Que faisait-il là ? Il ne le savait que trop.

Il avait erré, longtemps. Sur des sentiers détournés, au plus profonds des bois... Il y avait eu un temps où il était encore homme. Avant de comprendre.

Ils l'avaient chassé. Forcé à fuir, comme un coyote nocturne, en catimini. Certains parlaient de se faire un manteau de sa peau. D'autres le craignaient, détournant le regard. Il n'avait pourtant pas tant changé ; mais la plupart imaginaient qu'il était marqué de la malédiction des Pourprerage.

De ses cheveux roux, il ne pouvait se départir. Et depuis l'accident du bûcher, il avait acquis une réputation d'immortel. Il savait que ce n'était pas vrai ; il le ressentait au plus profond de sa chair meurtrie. Mais il sentait aussi autre chose, quelque chose de nouveau. Un passager clandestin, un inconnu, qui a présent rampait en lui comme une lave paresseuse sur les flancs d'un volcan éteint. Il était la, immobile, au creux de son âme, rempli de noirceur, prêt à bondir. Sa convalescence lui avait fait entrevoir la force du damné ; il voyait différemment, entendait mieux, bondissait plus fort, plus vite... Et il avait faim. Continuellement faim. De chair, de volailles, de brebis, d'enfançons. Mon dieu.

Il avait fui. Craignant pour lui, craignant pour eux. Il pensait pouvoir apprendre à le dominer. Mais, dans les bois, lorsque l'odeur de l'humus se mélangeait avec le pourrissement d'une carcasse, lorsque la pluie hurlait sa chute, lorsque le vent lui postillonnait au visage, il avait compris qu'il ne pouvait pas. Épuisé, affamé, transis de froid, il l'avait laissé prendre le contrôle ; pour une fois, une unique fois, pensait-il. Il ne s'était pas fait prié.

Il avait chanté à la lune et galopé à flanc de colline ; il avait dansé avec les étoiles et pisté de majestueux gibiers ; il avait fouraillé le ventre chaud d'un sanglier et s'était roulé dans la bauge. Il avait aimé, espéré, il avait brisé ses chaînes de l'humanité. Il s'était battu à en perdre haleine, vaincu autant qu'échoué ; il avait appris à être, et à ne plus paraître. Il était enfin lui, il était eux, il le savait. Fils des Pourprerage, chien de la lune, mi-homme, mi-bête.

Le reveil avait été ardu. Il avait pleuré, deux jours durant, de n'être qu'un homme. Il était pourtant un peu plus, mais il souhaitait ne plus en être un. Il s'était fait une tanière, rejetant son humanité et acclamant la sauvagerie qui l'habitait. Il attendait, dépérissant, le moment où il pourrait rejoindre ses frères, cette fameuse nuit où il redeviendrait lui même. Lorsqu'elle s'approchait, son poil se faisait plus dru. Sa soif de sang plus forte. Il était nerveux, impulsif, agressif. Il sentait tout. Les respirations du monde, ce souffle court, diffus, qui le parcourt. Il piaffait d'impatience, avant d'enfin pouvoir se transformer.

Cette demi-vie avait duré des années. Il ravageait régulièrement les sous-bois, donnant naissance à quelques contes pour effrayer les enfants. « N'allez pas dans les bois la nuit, la bête rode... » Et il rodait, lui. Il avait bien dévoré un paysan attardé ou un enfant impétueux, plus par mégarde, par plaisir de la chasse. Il n'y avait pas de défi ; l'odeur de l'urine, de la peur, emplissait l'air à son premier grognement. Les cerfs étaient plus coriaces. Mais vint un jour où un brave se décida à lui courir après. Il voulait savoir, connaître la vérité. Courage et curiosité n'ont jamais fait bon ménage. Lunaire l'avait éventré après quelques heures de piste. Alors, les choses s'étaient, à nouveau, envenimées.

Une battue. Des chiens, des armes. Des péons, en nombre. Trois ou quatre ecclésiastiques. Et bien sur, de jour. Il passait ses nuits à courir, ses jours à dormir. Il s'était fait attrapé comme un idiot hagard, nu et velu, sale et puant, incapable de beugler autre chose que des onomatopées étranges. On l'avait battu, enfermé, torturé. Exposé sur la place publique, affamé, brûlé. Il guérissait vite, pour le plus grand plaisir de ses tortionnaires : un spectacle à peu de frais pour amuser la populace et rassurer les mégères. Une taverne avait ouvert en face de la poterne, L'homme-chien, qu'elle s'appelait. On y ripaillait en regardant ce drôle de jeune homme se faire lyncher. Puis, les badauds s'étaient lassés. On avait voulu l'abattre, mais un étrange bonhomme avait proposé de l'acheter. Un elfe hautain, d'une contrée lointaine, un original en bottine, et canne d'apparat. On l'avait mis dans une cage, sur roues, cette fois, tirée par deux solides poneys. Mais, hors de vue du village, l'elfe était venu l'inspecter.

Il s'était penché vers la grille, les yeux plissés, les narines écarquillées. Il avait remuait les lèvres sans qu'un mot ne sorte. Lunaire s'était jeté sur le fer, pour arracher ce noble visage de ses ongles crasseux. Mais il était vif, et un coup de cravache avait cinglé, visant juste entre les deux yeux.

« Tout doux, le puant. Tu me comprends ? Tu sais parler ? »

La question le laissa interdit. Parler ? Depuis quand ? Comment ? Il se racla la gorge.

« herck.
-Je prends ça pour un oui. Et un non. Je t'appellerai le bavard.
-Lunherk.
-Lunherk ? Lunerk le bavard, alors. »

Lunaire haussa les épaules. A quoi bon.

« Si tu me promets de te tenir, de te laver un minimum, et d'être docile, tu pourras sortir. Dis Herk si tu es d'accord.
-Herk.
-Allez, c'est un marché. Qu'on le libère, et qu'on le nettoie. Rapidement. Il schlingue. »

On avait obéi à elfe. On l'avait même parfumé, et habillé. Il aurait pu s'enfuir. Mais c'était la première fois depuis bien longtemps qu'il ne sentait pas un fer rouge lui chatouiller les côtes. La curiosité l'emporta.

Et à présent, il était ici. Sur raceodhil. Un continent malheureux, de guerres et de batailles. Le marquis avait été son maître. Il avait été son précepteur. Il était à présent son ami. Il avait avait appris à maîtriser son effroyable don ; à l'utiliser ; à l'accepter. Il était devenu un excellent lieutenant : il mènerait les troupes de Mù la où elles n'ont encore jamais été.

Neige Le Festheur | 08/06/15 11:13

( très sympa à lire :) )

J'ai hâte de faire plus ample connaissance avec lui.

Maître Rat | 09/06/15 21:40

clap clap clap!!!

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Rat, tout simplement

Estré | 21/06/15 23:48

Et moi qui croyait que le Marquis collectionnait les artefacts. Il semble également affectionner les rebuts de la société. Où cela nous mènera-t-il ?

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Estré, fils de Pépé Narvalho

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