Forum - Terre d'Olwë - Retrouvailles

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Shadee | 20/07/14 14:01

Il perce à toute allure le royaume du plein, autant de ténèbres qui n'engourdissent guère ses perceptions. Il contourne le repos du Léviathan et file à toute allure vers les hauteurs de la vertigineuse falaise, il remonte le courant du fleuve souterrain et ses nageoires puissantes caressent la cascade qui offre une lueur bleutée. Nul ne connaît le mystère de ces lieux sauf les monstres des Temps Oubliés et l'Intouchable. L'abysse s'éloigne toujours plus sur ses arrières. Le premier seigneur de ce royaume reliant le Plein et le Vide jaillit de l'océan tel un boulet de canon. Les gigantesques gerbes d'eau manquent de retourner la frêle embarcation perdue dans l'immensité. La lune scintille sur les écailles d'un bleu sombre, les ailes gigantesques se déploient et le dragon se dirige maintenant vers les étoiles, il goûte depuis ce qui lui paraît être une éternité la saveur de l'air, son torse bardé de piques se gonfle, et il offre aux cieux un rugissement digne de mille lions. Il reprend une profonde inspiration et garde l'air bloqué dans ses poumons, comme pour s'amuser la créature file devant le bateau et expire les ténèbres qui l'enveloppent et la font soudain disparaître. La créature est suivie d'une trentaine de paires d'yeux effrayées, les matelots raconteront qu'un nouveau monstre pouvant devenir invisible hante les eaux et les airs... Qu'ils fassent, il existe.

Vêtue ainsi de la nuit, la créature contourne une bâtisse sombre, entourée de tant d'enceintes qu'elle semble morte. Il ressent des étincelles de vie, discrète et secrète dans ce Krak. Il ne voit nul intérêt à rencontrer une amante délaissée encore un peu choyée et quelques serviteurs oisifs, le maître des lieux n'est pas là, il ne fait que passer de temps à autre. Il braque alors vers le courant chaud et remonte vers l'astre nocturne. Et dans un langage silencieux, le vent décide de l'aider en le guidant vers celle qu'il cherche de tout son coeur. Il pensait qu'elle les avait abandonnés, lui et sa soeur, pour se donner la mort. C'est ce que tout le monde racontait et leur père semblait s'en moquer. Après des lunes et des lunes, quand le Léviathan avait secoué ses immenses dards de joie, il avait su que quelque chose avait changé. Son instinct lui avait alors commandé de quitter les abysses pour réunir les deux royaumes.

Le dragon file avec la puissance de l'éclair à travers un immense orbe invoqué, la porte occulte se referme aussitôt derrière lui. Dans ce monde myrillien, la nuit a laissé la place au soleil éclatant. Devant lui, une forêt s'étend sur des lieues, il choisit une percée pour se poser. L'air est délicieusement chaud et parfumé de vie. Tout vibre, tout a conscience d'être le maillon d'une chaîne universelle. Son esprit devient étourdi par cette vague pure de vie qui hante cette forêt. Il abandonne sa forme de dragon et prend celle qu'il a oubliée depuis longtemps, sa véritable forme de jeune homme blond, au teint de blé percé d'un regard bleu glacé. Il s'enfonce souplement sous le couvert des arbres. Un picotement de bien-être envahit sa nuque et coule le long de sa colonne vertébrale, jusqu'à ses pieds. Il a l'impression que ses orteils pourraient se transformer en racines. Il se sent bien, il pourrait rester ici. Il se concentre sur son but et se dit que cela doit être un charme jeté. Mais la sensation ne disparaît guère. Il s'éloigne de la clairière et à pas lents, il s'enfonce toujours plus dans la mystérieuse forêt. Le jeune homme prend conscience de la symphonie dont les notes sont autant de bourdonnements d'insectes, de chant d'oiseaux, du bruissement des feuilles, et même de ses pas contre le sol. Mais, l'envoûtement de cet univers s'empare aussi de celui de l'odorat faisant connaissance avec la suavité d'une fleur, de l'odeur boisée de l'humus, du toucher avec le frôlement des branches, des herbes... Les couleurs étouffées dans la pénombre participent au mystère et signe à l'intime privilège d'être dans cet endroit.

Peu à peu, la lumière devient plus franche, la majesté des arbres cède la place à celle d'un lac dont une rive est encadrée par deux immenses titans sculptés dans la pierre. Le jeune homme fait quelques pas vers les géants, puis il s'arrête quelques instants pour contempler la magnificence du lieu. Il sourit en pensant qu'elle n'aurait pu être ailleurs. Son coeur se pince, et son ventre se tord d'angoisse. Va-t-elle le reconnaître ? L'aime-t-elle toujours ? Il prend une profonde inspiration pour retrouver son courage et chasser ses doutes.

Il est tant impatient, mais aussi si inquiet... Il sait qu'il doit franchir ces deux géants de pierre. Avant, il doit réfléchir, il décide de se mettre à l'ombre d'un arbre pour avoir l'esprit clair. Une douleur atroce lui déchire le dos, le sang ne tarde pas à couler sur sa peau. Il s'arrache tant bien que mal à l'imposant tronc. Des radicelles dansent comme des vers affamés du tronc, elles se tendent vers la proie qui a eu la force de s'échapper. Le jeune homme recule effrayé et lacéré de douleurs. Les petites racines cherchent les gouttes de sang, lorsqu'elles les trouvent, elles les absorbent à la manière d'une rosée précieuse et rare. Dans l'instant même, de nouvelles pousses d'une beauté éclatante jaillissent. Avec horreur, il prend conscience que la beauté du lieu est irréelle et sans doute liée à l'horreur.

Il se retourne derechef quand des pas et un rire s'approchent de lui. C'est une jeune fille qui semble avoir le même âge que lui. Pas encore adulte, mais guère non plus une enfant. Elle a le teint sombre et les cheveux si blonds qu'il semble presque blanc. Elle est gracieuse et fine, elle ressemble à une panthère au regard d'argent dans sa robe fluide, stricte et noire.

- Vous avez eu de la chance ! J'en ai vu littéralement se faire dévorer et absorber par les arbres. Mais, vous n'auriez pas été tout à fait mort, votre vie aurait été différente. Qui êtes-vous, intrépide étranger pour venir sur la Terre d'Olwë ?

Plus elle s'approche, plus il sent son coeur cogner dans sa poitrine. La douleur est oubliée, la surprise est remplacée par une autre. Il se lève et avance vers elle, maladroit :

- Orféa ?

La jeune fille stoppe net ses explications, paralysée dans sa marche, elle détaille davantage l'inconnu. Ses traits ont quelque chose de familier, il lui ressemble un peu... Elle hésite, recule même alors qu'il ne cesse de s'approcher. Puis sans crier gare, elle se précipite dans ses bras, les larmes aux yeux :

- Pourquoi m'as-tu laissée seule ? Je te déteste pour avoir fait ça !

Il serre fort sa soeur dans ses bras, et sent l'émotion l'envahir, la joie des retrouvailles. Il se rend compte combien elle lui a manqué. Il la couvre de baisers, maintenant, elle ne cesse de rire, elle l'emporte dans une folle ronde. Épuisés de rires et de joie, ils se laissent aller le dos sur l'herbe, ils reprennent leur souffle en regardant les nuages paresser dans l'azur.

- Tu ne me quitteras plus, Haelyon ?

Il tourne le visage vers sa soeur et lui répond avec un doux sourire :

- Plus de cette façon. Quand elle partit, j'ai senti le besoin de m'isoler. Elle m'avait ouvert une voie, montré un chemin; je l'ai donc suivi en espérant un peu la retrouver de cette façon. Je me suis découvert, ce n'est que le début. Est-ce bien vrai qu'elle est revenue ?

Sans quitter les nuages des yeux, Orféa répond d'un ton neutre :

- Oui, mais elle n'est plus celle que tu connaissais. Notre mère est une déesse. J'ai l'impression qu'elle m'aime, comme j'ai l'impression que je lui importe peu parfois, et jamais elle n'a parlé de toi. Mais maintenant, tu es là et je suis la plus heureuse.

Il déglutit, ne sachant que dire aux mots de sa soeur, cela sous-entend aussi tellement de choses pour eux. Et le fait de connaître le statut de sa mère alimente un peu plus son angoisse. Cependant, ils sait que l'ombre de sa mère était près de lui parfois.

- Je viens pour rester avec vous. J'aimerais la voir pour lui parler.

Elle se retourne vivement et se lève en lui tendant la main. Le jeune homme ne la saisit pas et avise les deux titans de pierre en se redressant.

- Voyons voir si tu es aussi rapide qu'avant, Orfette la Crevette !
- Tu vas voir ce que tu vas voir, Haelyon tête de lion !

Outrageusement amusée, la jeune apprentie assassine déploie son énergie pour rattraper la course de son frère. Tout de fougue et de rires, ils franchissent les titans qui frémissent à leur passage. L'Intouchable reçoit le message, elle quitte le couvert de son secret, telle une apparition au milieu d'un chemin sylvestre, la Dame des éléments attend ses enfants.

Edité par Shadee le 20/07/14 à 14:16

Bart Abba | 20/07/14 20:24

Ke dire.... :o

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Bart Of Ze Horde
Nul n'est censé ignorer la Horde.

Zorander | 21/07/14 09:03

c'est beau , non ? :)

Khan Zorander - chef des orcs de l'Empire de Bandakar

Edité par Zorander le 21/07/14 à 09:03

Noir-feu | 23/07/14 01:09

Instinct.

L'espadon fend les airs, décrivant des arabesques foudroyantes depuis des heures, infinie répétition visant à atteindre une inaccessible perfection martiale, qui toujours s'éloigne davantage. Sa course ralentit imperceptiblement, jusqu'à cesser totalement lorsque la pointe se dépose au sol avec la légèreté d'une plume, produisant un infime tintement cristallin qui résonne pourtant dans la vaste salle d'entraînement du palais des Éléments. Le regard du Seigneur d'Obsidienne se tourne lentement vers un ailleurs, ses yeux de jais se plissent un peu alors qu'il tend son esprit pour mieux percevoir ce qui l'a distrait de sa danse de guerre. Cela n'avait été qu'une impression fugace, à peine un effleurement aux frontières de sa concentration, mais il ne lui en faut pas davantage. Pas depuis des siècles. Ses lèvres se relèvent en un sourire songeur lorsque en lui résonnent des mots entendus si longtemps auparavant:

Daifenniens, empruntez la route qui file, semblable à la force du torrent, où se glissent très habiles les longs rires du vent...

Sans hâte, il sent qu'aucune urgence ne pèse dans l'instant présent, il rengaine la longue lame dans son fourreau et la dépose sur une sorte de socle prévu à cet effet. Il fouille ensuite brièvement une poche, en sort un étrange médaillon à trois branches entrelacées et le contemple, envahi par un flot de souvenirs. Souriant à nouveau, il le rempoche et s'approche de l'une des vastes ouvertures de la salle qui donne sur un jardin immense situé quelques étages en contrebas et pourvu d'une variété incroyable d'arbres, arbustes et massifs floraux, une profonde impression de paix se dégage de ce lieu. Il songe que cela n'a pas toujours été le cas, et est heureux que les temps aient changé. D'un bond souple il se juche sur le rebord, et saute. La métamorphose est si vive qu'elle échappe à l'oeil, déjà ses vastes ailes s'appuient sur les vents et le Dragon jaillit vers les cieux comme un météore, l'emportant vers le lieu caché qui recèle un passage vers Myrilla. Il reprend forme humanoïde pour le franchir, arrivant bientôt sur la terre des Primotaures, lieu d'origine de son épouse. Il s'imprègne durant un moment de l'esprit de ces lieux, puis reprend sa forme Dragonnique pour rejoindre en quelques coups d'ailes la frontière qui marque l'entrée du royaume d'Olwë, matérialisée par deux immenses statues qui paraissent garder les lieux. Prenant soin de ne pas franchir l'impalpable barrière, il se pose devant les géants de pierre, grimace intérieurement parce que la Quête de Num lui a laissé comme un arrière-goût désagréable à propos de statues, mais ce sentiment disparaît aussi vite qu'il est venu, les temps ont changé et la Pétrifiée n'est plus que poussière dans le Néant.

Instinct.

Celui, sauvage et volcanique, du Dragon, bien sûr. Mais aussi un autre, qu'il ne connaît pas vraiment. Quelque chose qu'il n'arrive pas à définir précisément, quelque chose de nouveau qui a germé en lui, les puissances seules savent pourquoi. Cet autre instinct est différent, plus doux d'une certaine manière, mais le Seigneur des Dragons Noirs sent qu'il pourrait devenir plus effroyablement ravageur que celui qui le guide habituellement si les circonstances l'y incitaient. Légèrement perplexe il observe les environs, repérant vite deux petites silhouettes qui courent non loin. Il retient son souffle, sentant son coeur battre avec une rare puissance au sein de son poitrail bardé d'écailles. Il réalise à cet instant combien le temps a filé alors qu'il errait, piégé dans des illusions qui contenaient des illusions qui contenaient des illus...vertige.

Il se ressaisit, laisse la joie qui irradie son âme s'exprimer sous la forme d'un formidable rugissement plus sonore que cent coups de tonnerre puis se métamorphose à nouveau, franchissant sans même y penser les deux gardiens de la Terre d'Olwë à la suite de ces deux petits êtres pressés qu'il vient d'apercevoir. Pas davantage il ne songe au fait qu'ils pourraient bien ne pas le reconnaître, l'ont-ils seulement connu un jour? Qu'importe, qu'importe le passé, ils sont là, ses enfants, leurs enfants. Soudain il ressent la présence de leur mère, de cette femme-déesse qui règne désormais sur ces lieux. Puis il la voit. Il s'immobilise, une infime sourire au coin des lèvres, tandis que son esprit survolté canalise tant bien que mal l'émotion profonde que fait naître en lui cette scène familiale si banale pour beaucoup, si rare pour lui.

Instinct.

Celui d'un père. Lentement, comme pour savourer de tout son être ces instants de pure magie et laisser à cette compréhension le temps de faire son chemin en son âme, il avance vers ces trois êtres qui représentent tout pour lui.

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