Forum - [Certadhil III] Rumeurs

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Ildrina | 16/02/11 23:19

Marty posait un regard vide sur la mousse qui résidait tout au fond de sa chope. La pinte s'était vidée. L'elfe la faisait tourner d'un geste machinal et pensait sombrement. Ils étaient deux, assis dans ce petit boui-boui minable qui servait de refuge aux soldats en permission. Ce soir, au grand dam du barman, ils n'étaient pas là.

_ Hep ! Garçon encore une pour mon pote Marty !
_ Une pour la quatre ! Une bière pour la quatre !

Marty leva ses yeux sombres vers son camarade. Sa mauvaise humeur se lisait sur les traits de son visage marqué. D'une main il attendait sa boisson et de l'autre ses doigts gratouillaient les cordes d'un luth avec un vague rythme mou.

_ Tu sais, Hal', tu sais, on n'a tout simplement pas notre place ici. Il n'y a pas de boulot. Tu te souviens pourquoi on s'est embarqué ?
_ Un peu que je me souviens ! Certadhil ! Le continent du mal ! Le continent des grandes batailles, des seigneurs de guerres, des armées enragées, des désespoirs romantiques, le continent des trahisons, le continent des grandes histoires.
_ De quoi devenir riche, n'est-ce pas ? De quoi écrire de magnifiques chansons, épiques, tendres ou tendues. C'est ce qu'on nous promettait. Mais depuis qu'on est là, as-tu déjà vu quoi que ce soit ? Il ne se passe rien, je te le dis, Hal, rien du tout. Le métier de barde n'est plus ce qu'il était. Il faut qu'on fasse quelque chose : ici on est destiné est le chômage technique !

Hal était un elfe un peu petit et aussi un peu ridé. Lorsqu'on l'entendait chanter, l'elfe semblait avoir vécu la totalité de ses ballades même les plus horribles ! Il avait la tête de l'homme que l'on retrouve au premier rang des batailles. Mais ce n'était qu'une façade, un artifice, l'homme ne s'était jamais vraiment battu et commençait à se faire vieux pour avoir l'envie de commencer.

_ Il faut bien se rendre à l'évidence. Dans le royaume d'Ildrina tout marche à merveille. Pas de surprise, la routine quotidienne, et ce n'est jamais ce genre de gestion qui nous sert à nous autres, tu le sais bien. Pas de guerre. Tu combien cela fait de lune que l'armée n'a pas participé au moindre combat ? Dix lunes ! Dix lunes !
_ Et il n'y a pas que ça... Les gens vont bien. Les gens vont bien, ils sont contents ! Tu t'imaginais cça ? Des gens heureux ici ? Mais où va le monde ! Je commence à penser qu'elle fait ça pour nous empêcher de trouver matière à écrire sur elle, la garce.
_ Ca, ca... Je ne sais pas. Mais ce que je sais, et ça c'est sûr, c'est qu'on ne manque de rien. Enfin, de presque rien. Chaque lune les gens peuvent aller faire leur marché sans problème. Ils ne trouvent pas toujours ce qu'ils veulent, mais les marchands sont légions. La ville est riche, les gens heureux, l'armée bien entraînée et équipée. Si ça n'est pas une gestion exemplaire...
_ Ca en devient même louche, tu ne trouves pas ? Moi, ça me tracasse. Comme est-ce qu'ils font les généraux pour arriver à faire ça. Je n'ai jamais entendu parler du moindre seigneur qui partirait en conquête et qui arriverait à la fois à faire vivre ses sujets correctement et à éviter la guerre. Il y a un truc derrière ça, certain, s'exclama Marty, profondément convaincu. Pense donc. Chaque lune nos soldats partent en mission pour protéger un royaume allié, un ami ou quelque chose comme ça. Et même s'il n'y a aucune défense ici, personne n'attaque. Ce serait pourtant une mine d'or !
_ Enfin, on ne peut pas être sûr qu'il se passe quelque chose. Mais on peut toujours le dire. Après tout on est des bardes, pas des historiens, la vérité, ce n'est pas nous que ça concerne. Imagine un peu... On pourrait commencer comme ça. Si on détruit la réputation des Grands, la panique pourrait gagner le peuple et alors, notre travail pourrait commencer ! Nous n'avons pas besoin de grand-chose pour gagner notre croute. ..

Marty plaqua brutalement un accord sur son luth, et sans tenir parfaitement sur ses jambes, commença à pousser une petite chansonnette au refrain entrainant. Toute la nuit durant, les deux artistes composèrent leur première ballade, inspirés uniquement par leur ventre un peu trop plein d'alcool. Et cela, sous l'oeil avisé d'un petit maigrichon et d'un gars un peu gras, les deux derniers clients de cette pauvre gargote.

Bart Abba | 16/02/11 23:31

J'adore ! :)

BOZH.

Baramir d'Eckmöl | 17/02/11 16:33

Mais on ne va pas s'en prendre aux Dames quand même :o:D.
Les Dames c'est fait pour être courtisées, pas poutrées. Nan mais !

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Baramir d'Eckmöl, Mister Daifen 2008.
Archiviste occasionnel de la Skippypédia

Ildrina | 24/02/11 18:54

[hrp: merci à vous ! Je suis assez déçue que certaines rumeurs des dernières lunes n'aient pas réussi à se répandre. Dans la suite des aventures de nos deux compères musiciens, on apprend tout sur les rumeurs qui ont été lancées, et pourquoi seulement certaines sont sorties des frontières du royaume d'Ildrina. Bonne lecture !
PS: Le corps principal de cette suite a été écrit la lune dernière, avant que les informations sur les combats de la lune n'aient été dévoilés.]

_ Non, non et non ! Mille fois non, Hal ! Ca ne marche pas ! Tu t'en aperçois comme moi, ça ne fonctionne pas.
_ Calme toi un peu Marty. On va en discuter un autour d'un verre. Allez descends de cette table et assied toi.
_ Peuh, vieillard ! Le jour où je t'obéirai, c'est pas demain la veille!

Visiblement Marty avait trop bu, comme souvent. Dans le boui-boui le plus célèbre des environs, celui qui se voulait ménestrel et barde à la fois était perché sur une table déclamant à qui voulait bien les entendre les vers de sa dernière création. L'elfe était un de ces jeunes insouciants à qui tout réussit habituellement et qui se retrouvent confrontés aux difficultés pour la première fois. Noyé dans l'alcool, convaincu que sa chanson était une des meilleures jamais écrites, il se trémoussait avec gaucherie sur la planche qui lui servait de scène. Pendant ce temps, Hal, son collègue plus âgé le regardait avec un air de désapprobation dans un bar vide.

« Alors que d'autres luttaient et luttaient en héros, lançait Marty à voix haute, les armées d'Ildrina restaient peureuses aux arrières des lignes. Les autres allaient au combat pour défier le Mal, mais Dame Ildrina n'était pas de ces preux seigneurs. Sur Certadhil la Maudite, chacun pouvait sentir la honte et le déshonneur qui dégoulinait des pores des moindres soldats au service de Dame Ildrina. Sur Certadhil la Maudite, dans les armées d'Ildrina l'écoeurement régnait car nul ne savait où sur quel lit elle s'était allongée pour payer ses dettes et forger son royaume. Nul ne l'ignorait, tout son être été pourri. »

_ Arrête, Marty, arrête. Il n'y a personne pour t'écouter, ça ne sert à rien. Les gens ne s'intéressent pas à notre histoire. Mais c'est toujours mieux que quand on racontait qu'elle se servait des caisses du royaume pour ses finances personnelles, non ?
_ Tu as raison, mais ça ne nous avance pas ! Personne ne souhaite entendre ce que nous avons à dire, déplora Marty les épaules affaissées.
_ Mais est-ce qu'on sait pourquoi ça ne marche pas, c'est cela qu'il faut trouver. Que nous manque-t-il ?
_ Un public bien sûr, un public !

Hal soupira. Le jeune elfe était décidément trop impulsif. Cela avait un avantage, il était facilement manipulable. Lors des concerts, lorsqu'ils récitaient leurs ballades Hal se contentait de jouer quelques notes et bien que Marty soit au coeur du spectacle, suant sang et eau, ils partageaient équitablement leurs gains. Le vieux barde haussa les épaules et ses pensées l'accompagnaient « si ce n'est pas moi qui l'utilise alors quelqu'un d'autre le fera. Et puis, c'est ça la vie, il faut gagner son pain... Tant pis pour lui, il ne se fera plus avoir au futur ! ». Le long soupir de Hal se termina, et le coude sur la table il pointa Marty du doigt.

_ Essaie de réfléchir quelques instants. On a commencé par raconter n'importe quoi, des problèmes financiers. Mais les gens s'en fichaient, ils n'ont besoin de rien qu'est-ce que cela peut leur faire les histoires d'argent du royaume ?
_ C'est pour ça qu'on est passé à toutes ces histoires. Ce tissu de mensonge à propos de coucheries et d'intrigues. Ca, ça aurait du les intéresser, les captiver. Même si ce n'est pas vrai, c'est des choses qui auraient du nous donner un public, même le plus stupide !
_ Oui, oui, ils y prêtent attention, ça les titille. Mais ils n'y croient pas. Tu l'as déjà vue la Dame Ildrina en vrai ? Il paraît qu'elle est plus vieille que moi, d'une. De deux, elle rayonne la bonté, rien qu'à voir son visage on sait qu'elle ne ferait pas ça... Nos histoires n'ont convaincu personne parce qu'elles ne pouvaient pas jeter le doute.
_ Et puis quoi encore ! Et tu as la solution parfaite, je suppose vieux squig ? Parce que moi tes combines, ça m'ennuie tellement que j'en ai la pointe des oreilles qui s'arrondit...
_ Quoique tu dises, si tu redescendais de cette table, sans tomber, et que tu t'asseyais là, je pourrai peut-être te proposer notre nouveau thème.

En effet, Marty était resté debout à s'agiter de façon désordonnée tout au long de la scène, tandis que le barman, un bonhomme à moitié sourd, s'était contenté d'essuyer des verres, seul dans sa cuisine. Deux hommes un petit maigre et un grand baraqué étaient rentrés discrètement et avaient commandé une boisson qu'ils sirotaient au comptoir. Le jeune barde, après moult efforts finit par laisser son corps alcoolisé s'écrouler sur le tabouret que lui proposait son ami.

_ Dis tout. Je n'ai plus beaucoup d'espoir.
_ Ce qu'il nous faut c'est quelque chose qui choque les gens, qui choque les sujets d'Ildrina et qui soit crédible. Donne-moi ton luth avant de le briser.
_ C'est mon luth, vieux cachalot défraichi...
_ D'accord d'accord. Tu as l'alcool mauvais Marty, on te l'a certainement déjà dit. Mais ce n'est pas tout. Qu'est-ce qui nous paraît étrange par ici : le royaume ne manque jamais d'argent, il arrive un nombre impressionnant de caravanes venant de tout le continent, les armées ne livrent jamais le moindre combat, et qui plus est le royaume n'est jamais protégé. C'est trop parfait.
_ Rien de nouveau sous le soleil, et t'as pas intérêt à sous-entendre que je suis saoul...
_ Si, si. J'ai réfléchi. Je ne sais pas si c'est le cas, mais si elle est si sûre que nous n'allons pas nous faire attaquer c'est peut-être qu'elle s'est entendu avec l'ennemi. Un marché, comme un pac...
_ Un pacte avec le Diable ! Un grand classique qui fait toujours ses preuves.
_ Ajoute à cela que nous pourrions l'accuser de traîtrise dans nos chansons ! Cela promet des retournements de situation, et des moments piquants. Et puis, si on invente un peu, lorsque l'on reviendra de Certadhil, personne ne le saura... Et il y a tellement de choses étranges que l'on pourrait expliquer grâce à ça ! Il y a sur nos terres des gens qui ne sont clairement pas des elfes. Dans nos histoires ils se transformeront en espion à la solde de l'ennemi, des agents du Mal contrôlé par Ildrina !

Hal avait discouru seul pendant longtemps. Marty en avait profité pour s'avachir pour de bon, profondément endormi. Le poids de l'alcool sur ses paupières les avaient fermées. Il émettait bien, de temps en temps, quelques grognements indistincts. La main de son partenaire le réveilla en sursaut.

_ Allez viens on y va, il se fait tard.
_ Hmm... Grmpf...
_ J'appellerai cette histoire Pacte Sombre sur Certadhil la Damnée. Elle commencerait comme cela : « Il était une fois une noble elfe qui sombra dans la déchéance et embrassa le chaos. C'est son histoire que je vais vous compter, son histoire et celles de ceux qu'elle a trahi. L'histoire de cette trahison qui mena des milliers d'âmes à l'horreur sur les terres de Certadhil la Damnée. » Pas mal n'est-ce pas, Marty ?
_ Pas mal. Mais, dis... On va pas nous arrêter si on commence à chanter des trucs comme ça ?
_ Non. Nous ne faisons que raconter des fictions, rien d'autre !
_ Oui, mais... Et si c'était vrai ? Je veux dire et si elle avait vraiment pactisé avec le Sans-Nom.
_ Hein ? Il n'y a aucune raison pour que ça le soit. Ce serait un comble qu'on invente une histoire qui se révélerait être la vérité. Ne dis donc pas de bêtise, tu as un peu trop bu certainement.

Hal venait de sortir dans et l'air frisquet s'engouffra dans la guinguette. Marty sentit une main le retenir par le bras.

Vous savez les gars... Je ne voudrai pas vous décevoir... Mais...

L'homme maigrelet qui les avait interceptés les fixait du regard.

_Votre histoire, je la garderai pour moi si j'étais vous . Le Sans-Nom est tombé. C'est fini.
_ Pardon, répétez-moi ça ?

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