Forum - [Certadhil 3 - Fin de la récréation]

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Gzor | 15/02/11 17:43

«- Asseyez-vous, messieurs.»
Un bruit de chaises raclant le sol se fit entendre. La séance d'État-Major commençait.
Les principaux subordonnés directs de Gzor étaient rassemblés dans la pièce.
Gzor balaya la salle d'un regard circulaire. Une quinzaine de ses généraux et associés étaient rassemblés autour de cette table. L'heure était grave, et il fallait agir vite.
Hadras, chef des gardes humains et un de ses amis, ne s'était pas assis.
«- Asseyez-vous, Hadras, répéta le maître des lieux.
- Seigneur, de sérieux problèmes m'incitent à passer outre l'ordre du jour. »
Le changeforme soupira. Ce chef des gardes était loyal et compétent, mais il avait la fâcheuse tendance à désobéir et à rentrer dans le tas sans réfléchir. C'était un militaire, après tout..
«- Je vous écoute... faites vite, nous n'avons que peu de temps à perdre.
- Bon, alors, commença l'épéiste, hésitant, voilà quelques lunes que des soldats que j'avais réclamé manquent à l'appel, et...
- Je vous arrête tout de suite, Hadras, c'est justement le sujet du jour. Maintenant, asseyez-vous. »
Le guerrier lança à son maître un regard surpris, et s'assit, sans faire plus d'histoires, visiblement rebuté par le ridicule de sa situation.

«- Maendelh, dit Gzor en se penchant pour voir son chef-scribe installé à un pupitre, c'est à vous. »
Le lettré plongea son nez dans une impressionnante pile de feuilles dont ressortaient le haut de son crâne dégarni.
«- Oui, l'ordre du jour indique que nous devons parler d'une expédition militaire, et je dois visiblement vous faire un exposé sur les tenants et les aboutissants de cette campagne...»
Aux mots "militaire" et "campagne", l'attention de l'assistance redoubla.
«- Comme l'a si bien souligné Hadras, releva sournoisement Maendelh, alors qu'un tic agitait la bouche de l'épéiste, plusieurs dizaines de troupes manquent à l'appel chaque lune, et ce depuis quelques temps déjà. Actuellement, notre écart entre les troupes que nous avions fait embarquer vers Certadhil et celles effectivement sur place est de - il porta une feuille en face de son visage - cent quarante-quatre soldats, ingénieurs compris, ainsi que douze engins de guerre. »
Les quelques officiers nains présents, ainsi que les gradés humains, eurent quelques réactions surprises.
«- On sait à quoi c'est dû ?, demanda un chasseur de géants richement cuirassé.
- Les navires les transportant ont coulés. »

Alors qu'un concert d'exclamations prenait les guerriers présents, le scribe continua.
«- L'explication est très simple ; depuis le début de la guerre, les navires, n'ayant aucun port où débarquer en relative sécurité, ont pris au fur et à mesure de l'augmentation du nombre de commandes de plus en plus de risques pour débarquer leurs cargaisons, étant donné que de plus en plus d'accès déjà peu sûrs tombaient aux mains de l'ennemi ou devenaient impraticables. C'est ainsi que de plus en plus de capitaines ont dû prendre par les récifs pour honorer leur contrat.
- Mais enfin, c'est stupide !, s'écria Hadras. Pourquoi font-ils cela ?
- À ce jour, très peu d'accès sont encore détenus par notre camp. Des méprises de frontières et des superstitions convainquent les navires de tenter le diable. Nous n'en ressentons les effets que maintenant parce que le problème n'a pris cette ampleur qu'il y a peu de temps.»
Les personnes présentes se regardèrent. Hadras fixa Mendelh, et posa la question qui brûlait les lèvres de tout le monde.
«- Bon, ça, c'est le constat, c'est bien joli, mais concrètement, que proposez-vous pour améliorer la situation ? »
Gzor se leva. Ses généraux le regardèrent, attendant qu'il prenne la parole. Maendelh replongea dans ses notes, une plume à la main, tenant le compte-rendu.
«- En théorie, quelque chose d'extrêmement simple - en apparence seulement - est à faire, commença Gzor : il faut sécuriser les accès. Bien évidemment, nous ne sécuriserons pas les petites criques et les chemin dérobés. Étant donné l'ampleur des flottes qui se dirigent vers nous, le plus efficace pour la protection serait de regagner le contrôle des grands ports. »
Il pointa du doigt la carte du continent. Elle était couverte par trois plages de couleur. En rouge se trouvaient les terres dirigées par le trio maléfique constitué par Gretaine, le Sans-Nom et, très récemment, par Baramir d'Eckmöl. Ces zones ne représentaient que peu par rapport àla superficie du continent. Des enclaves, des lopins, qui ne tombaient toujours pas...
Les royaumes des seigneurs daifeniens du Bien, comme on disait, étaient signifiés par une couleur verdâtre. Mais cette apparente unité avait-elle seulement un sens, alors que le morcellement annoncé de l'Alliance commençait à se faire voir ?
Entre les cités et les territoires vaguements affiliés, se tenaient des terres ravagées ou en proie à des guerres civiles, qui avaient la teinte jaunâtre du parchemin usé qui servait de support à la carte.

Gzor pointa du doigt deux endroit, l'un situé sur la mer, à l'extrémité est d'une baie située au sud de l'île, et l'autre situé sur la côte est, décalé vers le sud, à la base d'une pointe de falaises.
«- Les deux ports névralgiques de Certadhil : Ravendell de Keanor et Krashouane. Celui ayant la plus grande capacité étant Ravendell. »
L'assistance commença à voir où il voulait en venir.
«- Nous disposons de la puissance militaire suffisante pour reprendre le contrôle de ces ports et y ramener l'ordre. Libérer Ravendell devrait sécuriser correctement et pour longtemps le trafic maritime.
- Seigneur, vous savez, nous ne sommes pas les premiers à tenter de pacifier cete ville, répondit Hadras. L'illustre Balain, pour ne citer que lui...
- Voilà près de dix lunes que le Grulleux a été réduit en cendre. Et je crois savoir qu'il n'avait rien réussi à faire dans cette ville.
- Mais justement, s'il a échoué...
- Il ne disposait pas de notre puissance militaire. Son armée était assez réduite et en coincée à l'intérieur. De plus, cela ne m'étonnerait pas que les combats se soient calmés, et que les vivres et les hommes commencent à manquer là-bas : cela fait un sacré avantage. Notre cas est bien différent du sien.
- Combien d'hommes vous faudra-t-il ? demanda Hadras. »
Gzor se tut un instant, puis brisa le silence de l'assistance, qui attendait sa réponse.
«- Toute l'armée, ou, du moins, une bonne partie.
- Et... vous comptez ainsi laisser le royaume sans protections contre nos adversaires ?
- Peu importe, répliqua Gzor en agitant la main d'un air agacé. Si la situation actuelle se prolonge, nous en subirons les conséquences, qui iront d'une simple chute libre de nos effectifs à une défaite totale. Que choisissez-vous ? »
Le guerrier marmonna quelques paroles inaudibles et se tut.

«- Nous allons donc nous fixer pour mission de libérer Ravendell de Keanor, étant donné que c'est l'option la plus efficace, conclut Gzor. Nous partirons en campagne dans une semaine. Je vous charge d'établir un plan d'action, vous avez carte blanche. La séance est levée. »
Le chaises raclèrent de nouveau le sol. Les généraux, légèrements déboussolés, se dirigèrent uns à uns vers la sortie. Bientôt, Gzor resta seul dans la pièce.
Il se tourna vers la carte. Ravendell de Keanor, signifiée par quelques maisons, était dans une zone jaune.
Il prit une craie qui traînait là, et colora la cité en vert. Elle reviendrait sous peu dans le giron du Bien, et contribuerait, comme elle aurait dû le faire depuis le début, à l'effort de guerre.

Gzor.

Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn!

Bart Abba | 15/02/11 18:37

Belle initiative... Je plussoie ! :b :b :b

BOZH.

Edité par Bart Abba le 15/02/11 à 18:37

Gzor | 24/02/11 22:17

«- Seigneurs, ils reviennent ! »
Gzor sortit de sa tente de campagne. L'annonce criée par un observateur depuis l'extérieur allait marquer l'entrée de la campagne dans une seconde phase.
Cela faisait une petite journée que le camp de l'armée gzorienne était installé ici. Les nains avaient quittés la cité située à l'intérieur des terres trois jours auparavant, en compagnie des gardes humains. Ils avaient moins d'une lune pour ramener la paix à Keanor. Les généraux de Gzor avaient préparés en toute hâte un plan d'invasion à qui il ne manquait plus qu'une application concrète.
Il leva les yeux. Son regard portait vers la cité, située en contrebas, et qu'il surplombait depuis la faible hauteur d'une colline. Les soldats pointaient un groupe d'animaux ailés à l'allure menaçante qui, venant de Keanor, fonçaient vers le camp.
Les créatures, qui étaient au nombre d'une trentaine, descendirent vers le sol, et se posèrent autour de Gzor. Les soldats purent admirer leur étrange apparence.
Leur corps vert était constitué à la manière de celui d'un humain. Écailleux, il était cependant prolongé d'une paire d'ailes membraneuses et était surplombé d'une tête qui n'était pas sans rappeler une seiche ; des tentacules s'agitaient en lieu et place de la bouche.
Le changeforme était satisfait. Ses Ktulus avaient été envoyés dans la cité pour y faire du repérage. Ils avaient visiblement achevés leur mission ; l'expédition allait maintenant pouvoir passer à la vitesse supérieure.
«- Rassemblez les hommes, dit-il à Hadras, qui se tenait à ses côtés. Nous allons pouvoir fondre sur cette cité et la remettre dans le rang. Enfin...»
Un sourire cruel se dessina sur son visage. Il allait faire à ces enfants turbulents une leçon qu'il ne seraient pas près d'oublier...

Les soldats de Gzor étaient rassemblés en ordre de bataille. Ils s'étaient avancés en contrebas, à quelques centaines de mètres des murailles de la cité. Celle-ci était survolée depuis quelques heures par le dirigeable, qui larguait des tracts dans les rues et exhortait ses habitants exsangues à la cessation des combats et à la soumission. Il avait évidemment reçu sa part de volées de flèches.
Les rangs nains étaient compacts, ordonnés et imposants. Gzor était à la tête de ses troupes, à cheval, et les haranguait du haut de sa monture. Ces civils sont vos ennemis, martellait-il. Sans leur conduite stupide et irresponsable, vos frères seraient vivants et non pas vingt mille lieux sous les mers. Les moindres perturbateurs étouffent notre Cause, disait-il encore, et ces gens en sont ! Ce par quoi il conclut qu'il ne devaient pas hésiter à frapper si la moindre résistance leur était présentée.
Sur cette dernière parole belliqueuse, les nains l'acclamèrent. Le dirigeable, pour faire bonne mesure, survola les troupes.
Au sommet de la colline, on commença à scruter à l'aide de longues-vues les murs. Il y avait-il un signe d'unité des différents clans qui se déchiraient depuis si longtemps pour le contrôle de la ville ? Ou continuaient-ils dans leur rivalités stupides, là où seul faire front leur permettrait de tenir tête plus longtemps à l'envahisseur ? Il y avait-il signes de la mise en place d'une défense organisée ?
Les soldats, ne voyant aucun alignement de défenses extérieures, conclurent que les rivalités déchiraient toujours la ville. Peut-être même que les chefs de clans croyaient que tout cela n'était que des menaces visant à les impressionner, sans rien de concret derrière.
Lourde erreur. Très lourde erreur.
Gzor reçut les rapports. Il leva son épée, et ordonna l'attaque.
Les rangs nains, qui encerclaient la cité, commencèrent leur marche vers les murs dévastés, semblables à un rouleau compresseur qui piétinait le sol d'un nombre incalculable de bottes de cuirs.

Ils s'arrêtèrent à une centaine de mètres des modestes murs complètements en ruines. Les quelques bouts de remparts restants debout constituaient encore des obstacles à une progression unie et coordonnée.
Des ordres furent criés. Les opérateurs-catapulteurs commencèrent à s'affairer. Les armes de sièges furent parées.
Une parole s'éleva du poste de commandement. Les cordes défilèrent dans les poulies, les poids furent lâchés, les supports, soulevés. D'un geste unanime, les catapultes se mirent en mouvement.
Les rochers s'élevèrent lentement dans les airs, et allaient, malgré leur inertie passée, semer la destruction.
Tout autour de la ville renégate, les morceaux de pierres, durs et massifs, décrivirent une courbe savamment calculée.
Les soldats nains levèrent les yeux. Les rocs les survolèrent, certains tout en évitant de justesse un dirigeable peu prudent. Comme un seul homme, ils s'abattirent avec une précision mathématique sur les remparts.
Le choc ébranla la terre. Des éclats furent projetés, un nuage de la poussière fut rejeté, alors que les murailles fragilisées s'effondraient avec fracas.
Se protégeant de leurs boucliers, les nains, situés à une distance idéale, admirèrent le spectacle. Une clameur monta de leurs rangs. Puis, avec une unité effrayante, ils reprirent leur marche inébranlable vers le port de Ravendell.

Gzor passa à l'arrière de son armée, et, descendant de sa monture, embarqua sur le dirigeable, qui s'était posé dans l'espace désert situé entre le camp et les rangs nains. Le monstre des airs s'éleva, ses pales tournèrent. Il s'avança vers la cité.
Les troupes atteignirent les premières maisons. Bien qu'elles soient dans un piteux état, ce n'était rien à côté de celui des rues.
Ces dernières étaient impraticables. Jonchées de carcasses de véhicules, de cadavres animaux et humains autour desquels bourdonnaient des essaims de mouches et d'autres charmantes bestioles, remplies d'ornières, de trous et de nids de rats, elles semblaient sorties des pires souvenirs d'un mercenaire endurci. Quoi de plus normal, en y réfléchissant bien ; cette guerre n'était-elle pas censée être la plus abominable ayant jamais eu lieu en six cents lunes ?
Les rangs nains étaient désormais séparés en unités bien définies. Mobiles et bien entraînées, elles frappaient à chaque porte, fouillaient les maisons, alors que d'autres se stoppaient et patientaient, attendant que les rafles d'habitants se terminent. Le plan de la ville, établi autour du port, facilitait cette organisation. Cela ressemblait, se dit Gzor alors qu'il contemplait la scène de haut, à une battue. Une battue à hommes.
Quels autres crimes cette guerre allait-elle encore forcer ses participants à commettre ?
Les nains trouvèrent quelques pauvres gens en haillons dans les seules maisons à peu près intactes de cette zone. Ils s'étaient sans doute réfugiés là pour échapper aux combats, qui devaient s'intensifier en allant vers le centre-ville.
Les envahisseurs suivirent la procédure : ils leur ôtèrent leurs armes, les fouillèrent dans les moindres recoins, et les enchaînèrent par les pieds et les mains, avec des menottes de fer conçus pour s'assembler et former de longues chaînes de prisonniers. Les malheureux, qui ne comprenaient rien à la situation, se laissèrent faire, trop faibles pour résister.
Vu du ciel, tout cela ressemblait à un gigantesque étau, dans laquelle la pauvre cité était emprisonnée un peu plus à chaque minute qui passait. Les rangs nains formaient un cercle presque parfait. Leur coordination était extraordinaire.
Gzor aperçut, à quelques encablures des anciens murs, devant les regroupements de catapultes, un mur de rondins, bâti à la hâte par des ouvriers militaires dirigés par les ingénieur nains. Il était censé empêcher toute évasion.
Au sol, les nains avaient déjà enchaîné une vingtaine d'habitants, qui, selon les cas, servaient de boucliers humains ou étaient immobilisés par des planches en bois.
L'armée reprit sa marche vers la mer. Le plan d'action était bien établi : une unité stationnait dans la rue pendant que l'autre fouillait chaque cache potentielle. Les généraux de Gzor avaient définis des périmètres en cercles concentriques ; à la limite de chaque périmètre, les unités avaient ordre de s'arrêter en attendant les retardataires. Une fois que tous les escadrons avaient atteints ladite limite, la marche reprenait, et ainsi de suite.
C'est ainsi que, méthodiquement, les envahisseurs avançaient, alors que quelques civils s'enfuyaient devant leur progression. D'autres, au contraire, marchaient vers les rangs nains, heureux de voir enfin l'ordre revenir. Les phalanges ne faisaient pas de distinctions ; ils subissaient le même sort que les autres.

Au bout de plusieurs heures, alors qu'il avaient déjà progressé jusqu'aux premiers regroupements d'habitations, une troupe en armes surgit d'une place. Les même qui, de puis plusieurs lunes, participaient au désordre ambiant. Avançant d'une manière désordonnée vers le rang compact, ils ne se rendirent pas compte qu'une ligne d'arbalétriers épaulait ses armes à distance. Quand ils s'en aperçurent, les carreaux criblaient déjà leur corps. Ils tombèrent comme des mouches.
Suite à cet incident, alors que les files de captifs se faisaient de plus en plus longues, les nains redoublèrent de vigilance. Ils avaient pour consigne de prélever les armes de chaque cadavre ; le désarmement total de la cité était une garantie nécessaire de la paix à venir.
À peine une dizaine de minutes plus tard, une autre attaque, plus nombreuse, celle-là, parvint à ariver au niveau des troupes gzoriennes. Les barbus des montagnes rendirent coup pour coup, et le bilan de leur côté fut très léger.

Plusieurs heures plus tard, alors que la nuit tombait, les nains, qui avaient dores et déjà atteint la moitié de la distance les séparant du port, et avaient subis de nombreux assauts désespérés qui s'étaient soldés par un échec critique fumblelique pour les keanoriens, arrivèrent en vue des combats qui agitaient la cité depuis maintenant plusieurs lunes.
Des combats acharnés se tenaient dans chaque rue, et ne semblait pas avoir faiblis depuis les premières lunes de guerre civile, où Gzor avait survolé la ville en revenant des ruines de la M&W Corp. Partout, la fureur, les cris, les embuscades et les pièges rendaient cette cohue complètement grullesque.
Les belligérants, visiblement trop occupés à s'étriper, ne se rendirent pas compte de l'arrive de la masse naine, et défuntèrent dans la plus grande convivialité. Seuls quelques archers, postés sur les toits, tirèrent sur les troupes, provoquant quelques pertes ainsi que des combats d'un genre nouveau pour les nains : l'assaut de maison. Le tout se solda par un bain de sang.
En dernier recours, on faisait appel aux catapultes, qui se faisaient une joie d'écraser sous des monceaux de rochers les bastions des clans.
Les files de captifs s'allongeaient de plus en plus. Les chariots transportant les armes se faisaient de plus en plus lourds.
Toujours en voyant les derniers instants de la folie keanorienne, Gzor sourit. L'invasion était lente, les soldats avaient pour ordre de fouiller chaque refuge, chaque possible cache d'armes ou d'hommes.
Les combats se faisaient plus violents au fur et à mesure qu'on approchait du port. Les chefs de clans, voyant visiblement que leur dernière heure était venue, envoyaient leur hommes harceler les troupes gzoriennes. Le chien blessé mortellement mort plus fort...
Certains belligérants, qu'on avait visiblement forcés à se battre, se rendirent aux nains. On leur fit rejoindre leurs camarades enchaînés.

Le matin se levait sur la cité en ruines. Les territoires contrôlés par les keanoriens se résumaient désormais à quelques bastions tombant les uns après les autres et à une mince bande côtière, correspondant aux quais du port.
C'était fini. La plupart des chefs de clans étaient morts ou prisonniers. Rien ne pouvait désormais arrêter le rouleau compresseur nain qui s'approchait lentement et sûrement de leurs derniers retranchements.
Dépités, déboussolés ou juste tentant de sauver leur peau, les derniers ravendelliens pouvant encore combattre se rendirent à l'ennemi.

Les troupes naines atteignirent à l'unisson la mer. Terminant les fouilles, ils se congratulèrent. Ils avaient réussis.
Gzor ordonna au dirigeable d'atterrir sur la rade du port. Il mit pied à terre.
Il contempla ses troupes, et la longue file des captifs. Les Ktulus se posèrent autour de lui, menaçants.
Il sourit. Désormais, il était le maître.

Gzor.

Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn!

Edité par Gzor le 27/02/11 à 14:32

Gzor | 15/03/11 22:07

« L'ordre règne à Varsovie. »

Déclaration du ministre de la Guerre Bastien Sébastiani, interrogé sur la situation à Varsovie par les députés de la Chambre. La capitale polonaise était alors en proie à une révolte, réprimée dans le sang.

La mise en scène était implacable. L'humiliation, totale. C'était le paroxysme de la pacification de Ravendell, l'étape vers laquelle toute l'organisation de l'invasion était tournée, et par laquelle elle allait se terminer.
Les habitants de la cité violée, enchaînés et immobilisés, étaient alignés le long de ce qui avait autrefois été l'artère principale de la ville. Fatigués, résignés, ou indifférents, voire incompréhensifs, ils semblaient une longue chaîne de damnés, sur laquelle veillaient des soldats nains régulièrement postés entre eux et le pavé.
Gzor, ayant débarqué sur le quai du port, commença à remonter à cheval, entouré d'une escorte réduite, la rue le long de laquelle les keanoriens étaient dressés. Autour de lui, les Ktulus virevoltaient.
«- Ramenez-moi les élites des clans, dit Gzor d'une voix sourde. Ils vont enfin payer pour leurs crimes. Faite-moi signe si vous en attrapez un !»
Les créatures tentaculaires le regardèrent, et opinèrent légèrement de la tête. Une lueur sournoise traversa furtivement leurs regards. Leur rôle lorsqu'ils étaient partis en repérage dans la cité en guerre avait été, entre autres, de s'infiltrer dans les différents postes de commandements des clans, et de mémoriser correctement les faciès des chefs de famille.
Et ce, dans le but de les supprimer une fois qu'ils seraient en leur pouvoir...
Gzor récapitula mentalement les bonne nouvelles de la journée. Environ la moitié des chefs de clans étaient morts durant l'assaut de leur quartier général. Leurs cadavres avaient été identifiés par les charmantes créatures. Le reste devait sans doute se trouver parmi cette foule hagarde, car aucun mouvement n'avait été signalé par les différents contrôles de sécurité encerclant la cité.
Gzor commenca sa marche, au pas. Tous les regard se tournèrent vers lui. Derrière le seigneur victorieux, deux chevaux à l'allure cadavédrique tiraient une cage rouillée posée sur une charrue dont les roues, mal huilées, grinçaient.
Au bout d'un court laps de temps, un des Ktulus, dont les confrères inspectaient de près chaque habitant qu'il leur était donné d'examiner, vint voir Gzor, et lui montra un homme aux traits tirés qui portait des habits brodés.
Gzor sourit malsainement et, d'un geste de main, ordonna qu'on lui apporte l'individu.
Deux nains s'en chargèrent, enlevant à l'homme ses entraves. Celui-ci tenta de résister à la poigne des mineurs reconvertis en gardes, mais, manquant de forces, il fut traîné sur le pavé.
Gzor baissa les yeux sur lui. Toute la rue bruissait d'une rumeur excitée. Visiblement, il s'agissait d'un personnage respecté et craint.
L'humain, prostré, était agité de violents spasmes qui secouaient son corps. Il implorait la bonté du changeforme.
Celui-ci, le regardant, eut un rire cynique. D'un geste de main impérieux, il ordonna qu'on l'enferme. Le dignitaire déchu fut saisi et littéralement jeté dans la geôle rouillée.

«- Papa ! »
Une voix aiguë se fit entendre. Gzor tourna la tête dans la direction d'où elle provenait.
Un petit garçon d'environ trois ans, les mains potelées, tentait de tendre sa petite main vers l'homme dans la charrette.
Le changeforme le fixa, et hésita un court instant. Il avait visiblement devant lui le fils d'un des chefs de clans, un de ses héritiers. Il ne voyait pas en lui le mignon petit enfant qu'il était mais le potentiel adversaire pouvant prétendre à long terme à la succession de Keanor.
«- Emmenez-le aussi. », dit Gzor aux nains.
Ceux-ci se regardèrent, décontenancés, puis, s'avançant vers le petit bonhomme, le détachèrent et le laissèrent rejoindre son père dans la cage, où ils s'étreignirent.
Une femme cria. Sans doute la mère. Gzor ordonna qu'on l'emporte également.
Le convoi reprit sa route. Les Ktulus rapportaient de plus en plus de personnes, qui grimpaient dans la prison sur roues. Le but étant de décapiter les clans et de les rendre ingouvernables, tout héritier potentiel, qu'il soit époux, épouse, fils, fille, frère ou soeur ne fut négligé.

Quelques heures plus tard, toute la file des keanoriens avait été passée en revue. Une quarantaine de personnes avaient été saisies dans cette masse.
Le cortège, suivi de la cage grinçante, retourna sur la place centrale. Les soldats détachèrent les keanoriens alignés, encore entravés. Ces derniers se massèrent sur la place, curieux face à une espèce de construction carrée recouverte de velours rouge.
Les soldats sortirent violemment les captifs de la cage. Ils les séparèrent en deux groupes : les hommes d'un côté, les femmes et les enfants de l'autre.
Un carré de sécurité formé par les soldats nains de Gzor prit place autour de l'érection mystérieuse située au centre de la place publique.
On fit s'aligner les familles déchues qui avaient autrefois été à la tête des clans. Toujours juché sur sa monture, Gzor sortit un papier de son manteau. Se postant en face de la foule, étonnamment dense, il leur fit la lecture de l'acte, qu'il avait lui-même rédigé.

« Article I : À partir de la proclamation du présent édit, et ce jusqu'à une décision contraire émanant du seigneur mentionné ci-bas, la cité de Keanor, définie par son enceinte, ses habitants ainsi que la totalité de leurs biens passe sous le contrôle du seigneur Gzor, qui pourra en disposer en usus, en fructus en abusus.
Article II : La guerre civile keanorienne est désormais considérée comme pleinement achevée. La cité reprendra désormais part à l'activité du continent Certadhil. Toute personne ayant occupé un poste important de commandement dans les différentes factions s'étant affrontées est considérée comme coupable de haute trahison, et condamnée à être pendu jusqu'à ce que mort s'ensuive.
Article III : Tout prétendu pouvoir des clans - ou de ce qui en restera, pensa Gzor avec perfidie - est déclaré illégal.
Article IV : Toute opposition à l'Autorité sera punie de manière rapide et impitoyable.
Article V : Un couvre-feu est instauré, du coucher au lever du soleil. Toute violation sera considérée comme un affront, et sera puni comme tel.
Article VI : Toute personne est, et ce, à tout moment et sous n'importe quel prétexte, déclarée corvéable par l'Autorité.
Article VII : L'Autorité se réserve le droit exclusif de modifier à tout moment l'édit ci-présent. »

Gzor cessa sa lecture. Les réactions de la foule étaient diverses ; on pouvait voir des visages souriants comme des face contrariées.
Un silence lourd s'ensuivit. Le changeforme rentra le papier dans sa poche, et fit un geste de main en direction des soldats qui entouraient les hommes encore captifs. Il éloignèrent les femmes et les enfants, qui étaient toujours enchaînés, et les conduisirent vers le port, où un navire les attendait.
Gzor regarda le petit groupe s'éloigner. Il avait prévu un programme spécial pour ces adversaires fragiles, quelque chose qui se déroulerait loin des regards...
Des nains enlevèrent le tissu criard qui recouvrait l'étrange édifice jusqu'ici voilé mais dont on pouvait, étant donné la cérémonie, deviner l'usage.
Un frisson parcourut l'assemblée lorsqu'elle le vit enfin. C'était un gibet. Ou plutôt, plusieurs gibets, alignés parallèlement et reliés entre eux par des poutres de bois, qui devaient faire ressembler l'ensemble, vu de dessus, à une grille.
Plusieurs cordes, arrangées en noeud coulant, pendaient macabrement au milieu de l'ensemble. De simples tabourets permettraient aux condamnés de parvenir à leur châtiment.
Mais le clou de cette mise en scène morbide était la présence des cadavres des chefs de clans morts lors de la reconquête, étendus au milieu des poutres de bois, certains déjà attirant des nuées de mouches qui virevoltaient en bourdonnant..
Le changeforme, regardant à peine les prisonniers, dont la peur était palpable, fit un geste de main en direction des nains.
Avec une coordination et une diligence étonnante, les soldats s'emparèrent des mâles héritiers déchus des clans, et, les traînant au milieu des cadavres et les forçant à se mettre debout sur leur tabouret respectif, les pendirent haut et court, devant un public qui n'avait eu que peu de temps pour anticiper et se préparer psychologiquement à la suite des évènements.
On apercevait des femmes qui, ça et là, cachaient les yeux de leurs enfants, afin d'éviter que leur âme sensible ne soit choquée par les corps, qui pendouillaient comme de vulgaires poupées désarticulées. Mais qu'avaient donc à faire ici, sur Certadhil, des enfants ? Gzor se mit à échafauder mentalement quantité d'explications et de solutions, puis décida de se concentrer sur la jouissance qu'offrait l'instant présent.
Devant lui, les dernières chances de renaissance de la vigueur des clans se balançaient lamentablement. Bientôt, leurs coeurs s'arrêtèrent tous de battre.
Le changeforme sourit. C'était le début d'une nouvelle ère pour la cité, débarrassée de la puérilité des conflits entre familles. La promesse d'une stabilité apte à la renaissance d'une économie de guerre.
Quelques objets fusèrent de la foule et s'écrasèrent contre les corps sans vie. Les keanoriens noyaient des lunes et des lunes de haine dans une vengeance posthume dont on pouvait difficilement les blâmer.
Les nains formèrent un carré de sécurité, qui s'étendit peu à peu en une allée humaine tracée vers une rue adjacente. Peu à peu, les gardes formèrent ainsi une voie dans laquelle Gzor s'engouffra, galopant vers un bâtiment qui allait devenir le siège de son administration.
Pendant ce temps, les civils commençaient à se disperser, commentant entre eux les évènements des dernières quarante-huit heures.

Gzor.

Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !

Edité par Gzor le 16/03/11 à 22:00

Kärel | 17/03/11 17:02

Aux grands maux, les grands remèdes... au moins, ça, c'est fait.

[Tellement cruel et radical que c'en est absolument délicieux :D ]

Kärel, Bretteur sans chemin.

Noir-feu | 18/03/11 00:35

Froid, efficace et méthodique. J'aime.

Lancwen de Sigil | 18/03/11 07:55

très bon RP! Keanor est entre de bonnes mains.

Celimbrimbor | 18/03/11 17:12

Voilà une manière intéressante de prendre une ville, tiens.

La Demeure Franche : [Lien HTTP]

Gzor | 12/04/11 16:16

Les hommes postés sur le pont subissaient les tangages depuis maintenant plusieurs heures. Ils avaient quittés le port de Keanor sur un navire affrété quelques jours auparavant par le seigneur Gzor. Le capitaine avait reçu une grosse somme d'argent contre son silence. En effet, bien qu'il était un habitué, volontaire ou pas, de la liaison Certadhil-reste de Daifen, la cargaison qu'il transportait était plus qu'inhabituelle, comme en témoignaient les soldats gzoriens postés sur le pont, et dont l'argent lui avait fait tolérer la présence.
Cette cargaison était constitué d'humains, visiblement des femmes et des enfants, l'air abattu, certains blessés. Le port où il avait accosté était lui-même marqué par les stigmates de ce qui semblait être de violents combats. Les signes ne trompaient pas : certains bâtiments étaient en ruines, ou à moitié brûlés, et des cadavres jonchaient les quais.
Il n'avait pas posé de questions. Cela n'était pas ses affaires.
Des cris et des pleurs montaient par intermittence de la cale. Parfois, ils se présentaient sous la forme de longues séquences d'expression souffrance. En arrière-plan sonore, des cris d'enfants. Il ne préférait pas savoir ce qui se passait en bas. Il se contentait de faire son job.

Il se tourna vers un homme casqué de fer qui stationnait depuis le début de la traversée dans la cabine.
«- Nous sommes arrivés à la distance des côtes que votre maître désirait. »
Le garde dévisagea un instant le loup de mer, puis sortit de la cabine.

Le lieutenant rassembla ses hommes présents sur le pont. D'un regard, il leur exprima que c'était à eux de jouer.
Ils pénétrèrent dans la cale. L'obscurité était en partie chassée par une lampe à huile se balançant au plafond, peinant à éclairer la pièce . L'odeur qui imprégnait le compartiment, mélange de poisson et de sueur, agressait le nez. Des humains étaient étendus ou prostrés sur les planches. Des femmes, séparées de leurs enfants, qui croupissaient pour leur part dans la cale opposée. On pouvait d'ici entendre leurs cris.
Le seigneur Gzor avait tenu à cette séparation. Le lieutenant se souvenait très nettement de sa rencontre avec son seigneur, qui lui avait donné les ordres pour cette mission. La froideur dans le regard de son souverain l'avait impressionné lorsqu'il avait détaillé les étapes et conditions, précisant des détails qui pouvaient sembler futils, mais qui renforçaient encore la torture subie par les captifs. Une vague pensée traversant son esprit lui souffla qu'il était au service d'un malade. Sans doute, après tout. Quelle importance ?
Il ravala son émotion à ce souvenir pour se concentrer sur ce qu'il avait à faire. Son regard se posa sur une femme fort jolie, qui, recroquevillée sur elle-même, pleurait en fixant avec terreur deux soldats, qui, un sourire goguenard en coin, semblaient satisfaits, d'une manière malsaine typique de soudards.

Les humains s'emparèrent des prisonniers, les détachèrent et les traînèrent dehors. Une épaisse couverture de nuages obscurcissait le soleil.
Les captifs, femmes et enfants, furent alignés sur le pont du bâtiment. La plupart se doutaient bien du sort qu'on leur réservait, mais, intimidés par les hommes en armes, ils n'osaient se débattre.
Les soldats de Gzor amenèrent plusieurs caisses, qu'ils ouvrirent. Ils en sortirent de lourdes pierres.
L'échine des prisonniers fut parcourue par un frisson. Les humains sortirent également des filets, qu'ils fermèrent après y avoir placé les rochers. Des cordes arrangées en leur extrémité en un noeud coulant devaient servir à rattacher la pierre.
Le lieutenant regarda la trentaine de personnes en son pouvoir. Il sortit de sa besace un papier, qu'un scribe lui avait donné. C'était ça, la bureaucratie et la paperasserie, on pouvait même plus exécuter en secret sans une déclaration officielle. Dommage, pensa-t-il.
La lecture fut courte. Grosso modo, pour complicité à un affront à l'autorité gzorienne, ils étaient condamnés à mort. Pourquoi cet endroit reculé, ce n'était pas mentionné, mais il était évident que cela avait pour but de camoufler l'exécution, qui, bien que logique et prévisible, pouvait provoquer la colère de la plèbe.

La dernière phrase du parchemin se heurta à un silence angoissant. Soudain, les gardes se jetèrent sur les captifs, voulant les attraper et leur attacher une roche au cou. Les malheureux crièrent, tentant de se soustraire à leur sort.
Le lieutenant de saisit d'une femme. Elle se jeta à terre, implorante. Elle se débattit sous sa poigne. Avec rapidité, il saisit la pierre et l'assomma. Elle cessa de gesticuler.
Le soldat jeta le lourd fardeau par-dessus bord, alors que deux de ses hommes prenaient le corps inerte et le projetaient hors du pont. La condamnée s'enfonça dans les remous pour ne plus jamais en revenir.
Autour de lui, ses hommes se livraient aux pires exactions. Certains possédaient les captives sur place, d'autre les tuaient directement.
Gzor lui avait dit de fermer les yeux.
Il rentra dans le château arrière, où le capitaine, sidéré, menait la barre.
«- Où va-t-on, maintenant ?, demanda le marin au soldat.
- Dirigez-vous sur Antiquitédhil, une compagnie de spadassins nous y attend. Nous devons les mener sur Certadhil.»
Le matelot hocha pensivement la tête, et retourna à son travail. Sur le pont, les dernières victimes - des enfants - étaient jetés par-dessus bord.
La mer finit bientôt d'avaler la lugubre offrande. Le navire s'éloigna, alors que les corps sombraient vers les profondeurs abyssales où seuls les poissons pourraient les retrouver.

Gzor.

Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !

Gzor | 12/04/11 16:22

Une brise fraîche chargée d'embruns marins rentrait par la fenêtre, ouverte sur la rue. L'atmosphère était calme, à l'image des journées qui s'étaient lentement écoulées depuis l'arrivée de Gzor à Keanor.
Penché sur un parchemin, le changeforme rédigeait une énième lettre de recrutement. Depuis son arrivée, les chiffres de la reconstruction de la cité avaient été revus constamment à la hausse. En une quinzaine de jours, la population de Keanor devait avoir doublé : les nouveaux arrivants, ainsi que les anciens délogés, avaient été abrités dans des tentes à l'écart de la cité.
Un bon millier d'ouvrier avait été appelé du continent, parfois de force, afin de reconstruire au plus vite les infrastructures portuaires, les quartiers d'habitation ainsi que les murailles. Un gigantesque chantier était en place à chaque coin de rue. À force de travaux ne s'accordant jamais de pause, les keanoriens et les renforts reconstruisaient la cité à une vitesse impressionnante. Le port était entièrement retapé, et les bateaux transportant soldats, vivres et matériel avaient désormais pour ordre de s'y rendre. L'activité économique de la cité reprenait des couleurs : les magasins d'armes, les tavernes rouvraient et se remplissaient. Lentement, Keanor, telle un phénix, renaissait de ses cendres.

À son arrivée, Gzor avait été relativement bien accueilli par les keanoriens, heureux de voir un seigneur mettre fin à la guerre des clans. Quelques ultimes attaques, soubresauts d'un ordre révolu, avaient visé les soldats chargés de faire régner l'ordre. Ces quelques actes isolés avaient été punis d'une manière exemplaire.
Les corps gisants dans les rues avaient été enfouis dans des fosses communes. Au bout de quelques jours d'exposition, les cadavres des chefs de clans avaient été retirés de la place et jetés en mer. Nulle famille ne pourrait plus demander des funérailles décentes de ces chacals.
De nombreux bruits couraient à travers la population à propos du sort réservé aux femmes et aux enfants, alimentés par le fait que le bateau les transportant, après une absence de quelques jours, était revenu sans ses occupants originels, et chargé d'une compagnie de spadassins humains, première vague de nouvelles recrues destinées à assurer le maintien de l'ordre à la place de l'armée de Gzor, qui avait d'autres chats à fouetter.
Les rumeurs les plus folles avaient vues le jour ; du débarquement sur une île déserte à la modification de mémoire ou la téléportation dans un plan hostile, les prolétaires n'épargnaient aucune hypothèse, si farfelue soit-elle.
Gzor sourit en repensant à ses bruits, qu'il laissait volontairement courir. La vérité est toujours plus réaliste que les légendes populaires.
Le sort réservé aux passagers était bien plus prosaïque, terrible, aussi. Il étati jalousement gardé comme un secret d'état, et on s'était arrangé pour que les rares témoins soient envoyés au loin ou tués au combat.

Tel était le bilan des évènements s'étant passés sous la première quinzaine de règne de Gzor sur Keanor. L'objectif était atteint : la ville était de nouvau prête à recevoir les renforts du continent.

Gzor.

Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !

Edité par Gzor le 12/04/11 à 17:12

Celimbrimbor | 12/04/11 19:26

Seuls les vainqueurs écrivent l'histoire.
Je n'aime pas les tyrans.

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Roxar | 13/04/11 12:07

Quel magnifique cruauté :o

Roxar, humble guerrier nain

Gzor | 30/04/11 18:24

(Chapitre co-écrit avec Kärel)

L'humain semble faire corps avec la nuit. Ses pas sont vifs et rapides, il semble aux aguets.
Il leva les yeux. En face de lui, un pâté de maisons ; la plupart sont en ruine, d'autres en cours de réparation. Une maigre palissade de bois cercle la cité, à perte de vue. Cette sortie de la ville visiblement récemment construite, est, elle, en pierre.
Il s'approcha. Quelques gardes, équipés comme le seraient des péquenots partant à l'assaut de la forteresse du Sans-Nom, l'aperçurent. Il se dirigea vers eux sans broncher.
Avec un professionnalisme surprenant, un soldat le stoppa alors qu'il atteignait le contrôle de sécurité. Sans un bruit, l'arrivant sortit de son plastron un parchemin, marqué par un sceau qui semblait officiel. Le vigile, visiblement prévenu, fit quelques gestes à ses comparses, qui s'écartèrent silencieusement. L'inconnu s'enfonça dans la cité en convalescence.

Au bout d'un certain temps passé à parcourir le dédale des rues sombres et peu fréquentées, et ce après avoir ricané en brisant un miroir du pied sous une échelle posée contre un mur tout en bousculant dans le même temps un chat noir, il arriva en vue d'un bâtiment dont les portes, située au bout d'un escalier derrière une façade à colonnes, étaient gardées par deux hommes en armes, immobiles comme leur fonction l'exigeait, hallebardes croisées de manière à empêcher un éventuel intrus de passer.
L'humain grimpa les marches de manière pressée. Présentant toujours la même missive aux nains défendant l'entrée, il fut implicitement autorisé à passer lorsque les armes s'écartèrent de son passage.
Il pénétra dans le bâtiment. Enlevant sa capuche, il découvrit un visage fin aux traits jeunes. Les cheveux blonds coupés courts, le regard perçant adouci par des pupilles d'émeraude scrutant le vaste hall d'entrée.
Il ne mit pas longtemps à apercevoir un humain, qui semblait l'attendre. Celui-ci avait les yeux rouges, les cheveux noirs taillés ras. Son regard d'acier dégageait une dureté et une cruauté qu'il n'avait plus à prouver.
L'arrivant se dirigea à grands pas vers ce maigre comité d'accueil. Il lui tendit une main gantée de plaques de fer. L'homme la saisit et la serra chaleureusement.
«- Harken, dit simplement, avec une sorte de soulagement dans la voix, l'humain aux pupilles rouges.
- Heureux de vous revoir, seigneur Gzor. » répondit Harken avec un sourire.
Soudain gêné par quelque chose, le changeforme demanda :
«- Où est votre maître ?
- Malheureusement, il n'est pas... disponible. »
Connaissant son ami, Gzor se dit qu'il y avait de fortes chances qu'il soit retenu par sa couette et son oreiller, et donc en train de goûter aux joies de la farniente.
«- Oui, oui, je comprends. » répondit le seigneur, mentant comme un arracheur de dents.
Le changeforme regarda son ami. Il avait bien changé depuis leur dernière rencontre sur Certadhil, deux ans auparavant. Ses traits s'étaient creusés, tout comme les siens, sans doute ; Certadhil ne vous laisse pas la traverser sans vous blesser.
D'après ce que Gzor savait, le seigneur Kärel, qui avait perdu le contrôle de ses troupes au début de la guerre suite à une sournoise mutinerie, s'était dans un premier temps réfugié à Keanor. Lorsque la guerre civile avait éclaté, il s'était retranché dans les navires l'ayant conduit sur Certadhil avec son état-major et ses élèves et n'avait plus bougé, occupé à défendre cette petite zone et à ourdir, entre autres, des plans de sauvetage pour ses hommes encore aux mains des rebelles elfes, des missions d'espionnage et des opérations commando.
Mais leur petit bastion s'était révélé trop peu sûr dans la guerre civile de Keanor. Un soudard maladroit ayant failli incendier le bâtiment principal et sentant que sa présence, en tant que seigneur certadhilien, était une source de danger pour ses disciples, il quitta la cité avec sa petite troupe. Ils réaménagèrent une ferme abandonnée à quelques kilomètres des murs, dénichant des vivres là où ils pouvaient, retournant régulièrement en campagne voler ce dont ils avaient besoin dans la cité de Ravendell. S'efforçant de passer inaperçus, ils y poireautèrent donc dans l'insalubrité et le manque jusqu'au jour où ils reçurent par un pigeon providentiel l'amulette permettant de traverser le portail menant à Myrilla, monde natal des primotaures, territoire paradisiaque où était désormais installé le nouveau centre de commandement de l'Alliance.
Ils y avaient donc élu domicile, quittant sans regrets les lits précaires de paille et de mites où l'on ne dormait que d'un seul oeil. Ils y étaient depuis désormais une quinzaine de lunes, profitant de la vie comme jamais depuis leur départ d'Ezaldhil.
Mais c'était terminé. Sur une invitation de son ami, le désormais puissant, craint et respecté de tous seigneur Gzor (pourquoi vous rigolez ? :o ), il se préparait à faire son retour sur Certadhil.
Un silence suivit ces quelques pensées, durant lequel les deux hommes se regardèrent les pieds. Brisant la chape de plomb qui semblait s'être abattue sur la conversation, Gzor reprit la parole :
«- Je crois que nous avons à parler affaires.
- Oui, en effet, répondit l'intendant avec l'air de s'excuser. Je vous suis. »
Le polymorphe l'invita d'un geste à l'accompagner.

Après avoir déambulé un certain temps dans l'édifice, Gzor poussa deux portes massives en chêne, menant à ce qui semblait être un bureau. D'un signe de la main, il lui intima de s'asseoir, ce que son hôte fit avec diligence.
«- Bien, commença le changeforme. Voilà donc la situation : je ne peux plus me permettre de garder le contrôle de cette ville. Elle est trop éloignée de mon royaume de base. Votre maître, bien qu'étant ici sans terres, a courageusement décidé de continuer la lutte. J'ai pensé qu'en lui léguant cette cité, il en aurait enfin les moyens. Enfin, tout cela, vous le savez déjà...
- Effectivement. Mon seigneur a cependant exprimé quelques doutes quant à la manière de gérer Keanor. Notamment au niveau... judiciaire.
- Que voulez-vous dire ? demanda Gzor, intrigué.
- Vous avez repris la ville portuaire par la force de manière brutale et... sanguinaire. Vous et vos troupes ont instauré des lois mêlant sécuritarisme et tyrannie. Comme vous le savez, Kärel est loin d'être un partisan de la loi martiale. Non qu'il soit contre vos agissements, bien au contraire car la situation exigeait une remise au point claire et efficace, mais sa manière de gérer une cité est assez différente de la vôtre. Le fait est que Keanor sort d'une période de crise, et malgré la reconnaissance des habitants quant à la fin de la guerre civile, il est probable que cette ivresse soit vite dissipée par une prise de conscience générale de la situation. Et je doute que la prise de la ville se soit effectuée dans des conditions idéales pour la liberté des survivants.
- Tout cela pour me dire quoi ?, coupa Gzor, lassé de la longue tirade du diplomate.
- En tant que seigneur actuel de la ville, Kärel désirerait connaître vos impressions concernant l'état psychologique de la cité. »
Gzor réfléchit un instant. Que voulait-il dire par là ?
«- Les keanoriens se sont habitués à ma présence, et beaucoup prétendent être contents de ma venue. Cela dit, il est vrai qu'il est peu probable qu'ils me gardent dans leur coeur... une transition vers un pouvoir moins taché par son histoire mais tout aussi ferme sera une bonne chose.
- C'est ce que nous voulions savoir. Seulement, la nouvelle d'un changement de main risque de faire émerger ce qu'il reste des anciennes factions rebelles. Et nous désirerions éviter un nouveau bain de sang. Mon maître a d'abord pensé à une passation de pouvoir officieuse, discrète, mais il vous voyait mal adopter ce genre de méthodes. Il a supposé qu'étant donné votre influence et les moyens à votre disposition, vous seriez sans doute plus apte que lui à trouver une solution... autre que celle du carnage, cela va de soi. »

Gzor se leva et regarda par la fenêtre la cité. Il considéra un instant les dires de l'intendant de Kärel. Il se rendit soudain compte que si le peu qu'il restait des clans et des factions hostiles à l'autorité des seigneurs se réveillait à l'occasion de la passation, il tenait là un moyen idéal pour les faire taire à jamais...
«- J'aurai bien une petite idée... dit Gzor avec un sourire. Cela va sans doute retarder la procédure, mais c'est un plan parfait pour cette occasion...»

Gzor.
Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !

Edité par Gzor le 07/05/11 à 10:46

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