Forum - [Certadhil III] Quintet littéraire sans fausse n'Olth

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Althâr Anthâar | 20/12/10 01:44

1. L'impuissance de l'un...
Par Althâr et Celimbrimbor.

« Échec et mat, » dit-il de sa voix douce et agréable.

Un court silence s'installe, le temps pour sa main de reposer le cavalier à un emplacement inattendu. Sur le damier blanc et noir, la fine épaisseur de feutre étouffe le son de la pierre sur la pierre. On n'entend même pas les espoirs et le coeur du joueur se briser sur le marbre poli. L'homme en capuche ne comprend pas très bien comment il en est arrivé là et pourtant, autour de lui, rien ne change. Les murs restent debout, le monde ne tremble pas et l'oiseau qui pépie joyeusement dans son vol solitaire ne tombe pas, mort, sur l'herbe grasse. Aucune catastrophe pour exprimer son désarroi. Pas même de la colère, non, cela, il ne connaît plus vraiment, il n'en a plus le pouvoir, mais un simple et misérable désarroi un peu désabusé, comme celui d'un rêveur qui, réveillé depuis trop peu de temps, ne comprend pas qu'il lui puisse lui être interdit de prendre son envol et cherche encore à explorer ce ciel qui lui était accessible quelques minutes auparavant. Abasourdi et pâle, il regarde le jeu, les pièces noires retirées, moins nombreuses que les blanches qui semblent lui adresser un sourire narquois. En face, l'autre ne bouge pas, neutre et martial, comme depuis le début de cette partie trop longue : froid et efficace. Même la pièce ne s'identifie pas à sa défaite et ne lui renvoie aucune impression. Le consul l'avait dessinée neutre et chaleureuse, étrangement hors de tout quand le temps s'y écoule pourtant à son rythme naturel. Il reprend sa respiration lentement mais avec cette sorte de panique qui saisit ceux qui sont restés trop longtemps en apnée de quelque chose, qu'importe quoi, et qui pensent que l'air, pour peu qu'ils en aspirent suffisamment, et suffisamment vite, sera un palliatif assez puissant pour les verser dans l'oubli. Dans le silence toujours étrangement solennel, un instant s'enfuit encore sans qu'aucun ne bouge. Toujours, la salle luit de cette pulsation lumineuse si particulière apaisant les sens et vivifiant l'esprit. Toujours, le ciel dehors est bleu. Il a perdu et rien n'a changé. L'encapuchonné repose ses yeux clairs sur le cimetière de sa grandeur, assailli de souvenirs qu'il repousse sans pouvoir les oublier vraiment. Là gisent sa morgue et sa puissance, son ire fantastique et son héroïque destinée. Il bat des cils comme pour chasser l'image de son fantôme du temps passé et considère sa défaite calmement, sans sentiment, comme ces êtres revenus de tout que plus rien ne peut émouvoir. De nouveau, il voit tous les mouvements de la partie qui ont mené à sa chute. De nouveau, il considère toutes les décisions qui ont créé ce rythme si particulier qu'il avait appelé vie. De nouveau, il examine les signaux de son opposant sans encore réussir à les déchiffrer. Un sourire amer éclaire son visage cependant : il n'a pas mal joué, non. Même, il a déployé tout son art, tout son être en cette seule partie. Alors qu'il boit jusqu'à la lie cette coupe d'amertume, il tend une main lasse qui vient gracieusement abattre son roi. Non, il n'a pas mal joué. Simplement, il a été battu. Et dehors, autour, partout, rien n'a changé.

Beau joueur, il se lève et présente sa main à son adversaire, sans qu'aucun d'eux ne remarque le petit grésillement dans le tissu de la réalité, comme une sorte de flou, de rupture dans le monde même, au milieu de nulle part. L'air se charge discrètement en électricité, sans trop se faire voir. Et puis soudain...

« C'EST TOI L'CHAT ! »

...tout change. L'univers devient une tapisserie insensée aux couleurs incertaines qui se mélangent et se dissocient sans logique. Plus rien n'est à sa place. Le monde tremble, les murs s'écroulent et l'oiseau ne chante plus, mort sur l'herbe grasse. La douleur, le ciel couleur terre, la douleur encore et puis... L'obscurité et la quiétude rassurante du coma et des rêves.

Althâr Anthâar | 20/12/10 01:55

2. L'inutilité de l'autre...
Par Althâr et Celimbrimbor.

Quelques lunes auparavant, une petite bouffe avait été organisée dans le camp établi par Althâr un peu au nord du tombeau de Kehan Olth, les réceptions de l'ancien Khân n'ayant plus à gagner leurs galons, grâce au bon goût du maître de maison [C'est pas moi, c'est lui.]. Cependant, un léger souci s'était fait jour, qui avait provoqué la dégénérescence inévitable et complète de la soirée magnifique qui s'annonçait : Althâr n'avait pas été prévenu et, quand les petits cerbères à têtes blanches du Rat avaient trouvé la porte close, ils avaient fait ce que n'importe qui aurait fait à leur place, c'est-à-dire frapper la porte, entrer et foncer comme des dératés vers le buffet. Problème : de buffet, il n'y avait pas. Aussi avaient-ils sustenté leur faim sur le corned-beef un peu trop faisandé qu'on appelle communément goules, s'offrant un gueuleton joyeux sans farce mais avec un dindon quand même.

Un lecteur averti nous ferait bien impoliment remarquer que, bon, quand même, Althâr, ça reste Althâr et que, du démon, il en bouffe pour le quatre heures quand il n'a plus de succube à monter pardon, à dompter. Le problème c'est qu'Althâr est féru de connaissances presque autant que les chiens aiment les balles, soit, beaucoup trop pour sa propre sécurité. [Ce qui me rappelle l'histoire de mon chien Toby, à qui j'avais lancé la balle vers un bosquet pas loin du vieux lac et...] [Hem.]

Donc, Althâr, à ce moment-là, précisément, était assis sur le trône en train de lire un petit traité de thermodynamique des fluides quantique [Pour info, c'est bien la thermodynamique qui est quantique, et soyez sûrs chers adorateurs de nos écrits qu'une telle lecture est tout à fait justifiée pour un alchimiste.] dans des espaces euclidiens non-réels et polynomiaux [Oui donc là c'est juste pour dire un truc compliqué, un espace euclidien comme vous le savez c'est réel et en pl...] [Ta gueule, tu casses tout là.]. Il avait autre chose à faire, en somme, que de se préoccuper des cris d'agonie douloureux - mais pas trop, pour ne pas effrayer nos plus jeunes lecteurs - de ses troupes, si bien que nous avons encore une fois raté l'occasion de prouver qu'une goule peut réagir instantanément à la douleur. Ou en tout cas avant de mourir. À nouveau. Non, il ne rendait pas la justice. Il lisait. Oui, en faisant caca, oui. Et, non, il ne chie pas des paillettes. C'est pas une putain de princesse. Mais, vous allez arrêter de nous interrompre bon sang ! On se fait... chier... à écrire des histoires un peu... chiadées... et vous êtes même pas foutus de rester concentrés deux minutes !

Donc, Althâr, à ce moment-là, faisait caca en lisant un bouquin hyper cérébral et sans illustrations rigolotes, que nous ne présenterons pas, au risque de passer pour encore plus idiots que nous le sommes déjà, et pour ce faire il était reparti au Palais. Dans la forêt. Au sud du camp. Vous vous rappelez ? On en a parlé dans je sais plus quel chapitre. Il était donc rentré, laissant son armée sans défense, à la merci du moindre petit danger. [Une armée sans défense, ça existe.] Car en terme d'armée, l'amas de chair putréfiée qu'il avait distraitement sortie de terre et animée ne pesait pas bien lourd...

Délesté d'un terrible poids intestinal et alourdi d'encore quelques pages de savoir, il était donc retourné au bivouac pour découvrir une note négligemment accrochée à l'un des rares murs encore debout de ce qui avait été son misérable campement, et sur laquelle on pouvait lire :

Merci pour la boustifaille, mais t'aurais pu faire un effort, c'était pas très frais tout ça.

Bises,

Le Rat.

Autant vous dire que le nainlchimiste [Celim, arrête d'essayer de trouver des noms d'espèces qui pourraient décrire Althâr, s'il-te-plaît.] brûla le petit papier et décida de prendre un peu de recul.

Ce qui signifie qu'il s'envola pour contempler les dégâts causés par l'incurie notoire du rongeur et de ses charmants amis. Le camp était en cendres. Bien sûr, c'est une image, vous comprendrez aisément que les pierres fondent seulement à une très haute température que même un dragon noir aurait du mal à produire sans entraînement et qu'après leur fonte, elles laissent un autre résidu que des cendres. C'est donc une image, qui compte sur le fait que, vous lecteurs, possédez un peu de culture et comprendrez que le signe, « cendres », ne renvoie pas à son signifié habituel, mais se transforme en signifiant symbolique autrement investi [C'est Celim qui déconne, là.][Ta gueule !].

Le bivouac était donc en cendres. Althâr hoqueta d'impassibilité en apercevant les corps horriblement déchiquetés qui jonchaient la chaotique étendue du centre de ses opérations. Enfin, centre, c'est un peu prétentieux, mais si jamais il avait dû lancer un assaut, c'aurait été d'ici. Il éprouva même, un instant, une indifférence polie envers les morts morts à nouveau. Après tout, la réputation déplorable des goules n'était pas une raison pour ne pas les pleurer. Certes, elles avaient une tendance certaine et agaçante à baver partout et à réclamer de la nourriture trop souvent, de même qu'une disposition à la stupidité la plus crasse, elles ne sentaient pas forcément très bon ni ne connaissaient les principes élémentaires d'hygiène, elles ressemblaient plus à une belle-mère défigurée par la petite vérole et le visage déformé par la colère, elles possédaient l'intelligence d'une huître et le sens pratique de Bourdieu [Le sociologue ?][Oui.], de même que leur charisme approchait difficilement celui d'un oursin apathique logé sous un galet, mais elles étaient tout de même des êtres vivants.

Ah, ben en fait, non.

Au terme de cette réflexion, Althâr s'aperçut qu'il n'en avait strictement rien à cirer et qu'elles n'avaient qu'à pas avoir été là et que c'était bien fait pour elles. Il reposa donc le pied sur le sol de Certadhil, morne plaine.

Une idée lui effleura alors l'esprit.

« Je me fais chier. »

Enfin, « lui effleura l'esprit. » C'est incroyable à quel point la littérature, de quelque nature qu'elle soit, fait appel à des tropes insensés [C'est Celim qui repart.]. Croyez-vous qu'une idée puisse effleurer un esprit ? Croyez-vous qu'une idée ait corps ? Qu'un esprit, dans toute son immatérialité, puisse être touché par quoi que ce soit ? Moi non plus. Mais si l'on devait cesser les métaphores à cause de l'odieux concept de mimesis, quel intérêt ? Savez-vous ? Moi non plus. Donc, nous ne dirons pas qu'il pensa une idée en son esprit. C'est laid. [C'est vrai que c'est laid.]

Ceci dit, Althâr se faisait chier. Il décida alors de faire ce que tout être un peu aventureux lâché sur un continent un tantinet hostile présentant des forces au-delà de toute mesure qui n'attendaient que la plus petite étincelle pour se déchaîner ferait : il décida d'aller voir en haut de la colline, là-bas, pour observer ce qu'il pouvait y avoir de l'autre côté - un peu comme la poule de feu traverse la route - et surtout vérifier s'il n'y avait pas des tronches à exploser dans le coin. Cependant, là où toute personne normalement constituée aurait fait le chemin à pied, le fier alchémachin [Celim...], lui fit un « pouf » assez amusant [C'est pas amusant ! C'est hyper sérieux la téléportation ! Sauf quand on sait pas où on va, c'est vrai qu'à ce moment-là, c'est drôle.] et apparut sur le sommet de la petite colline. Son regard glorieux se porta sur les alentours. Personne à perte d'horizon, seulement un soleil qui, sans se rendre compte de sa propre banalité, paissait dans le ciel qui, lui, pour n'être pas original, avait décidé de rester bleu et pur, malgré quelques nuages répugnants qui flottaient quelque part. Son visage resta impassible, glissant cependant un peu vers le déçu mais ses yeux pétillèrent quand ils avisèrent une autre colline, plus loin. « Pouf » bien entendu et voici le dragain [...][Quoi ?!] à son sommet, toujours dérisoirement banal. Les sourcils augustes du maître des alchimies [Ça, c'est bien.] se froncèrent de nuages et son front se plissa. La colère, plus que l'ennui, commençait à lui monter aux joues et ce n'était pas bon signe. Il aperçut une autre colline et « pouf » de nouveau. Et puis « pouf » encore, et encore. Et de « poufs » en « poufs », il arriva au bord de la mer sans rien avoir trouvé à massacrer ou à observer.

«Continent de merde. J'me barre !»

Et « pouf ».

La falaise qui surplombait la mer se retrouva déserte, le vent venant de nouveau heurter le granit des rochers pour s'y déchirer en une plainte languissante et affreuse. Quelques crabes sortirent des herbes où ils s'étaient cachés, attendant que l'étranger passe et les laisse tranquille. Les grondements salés d'embruns de l'océan brisé contre les murs reprirent de plus belle, comme la vie reprend son cours après la pluie et la tempête. Rien ne marquait la solitude du grand homme qui s'était tenu là un instant auparavant, plein de tristesse et de déprime, sans but, sans tâche. Rien ne témoignait, à part deux traces infimes de pas dans l'herbe humide, qu'un nain avait contemplé le monde du haut de sa rancoeur et qu'il l'avait rejeté. Personne n'aurait pu dire la noirceur qui avait saisi son être à voir le vide glacé de l'univers. Il avait disparu.

Edité par Althâr Anthâar le 20/12/10 à 01:57

Althâr Anthâar | 20/12/10 02:13

Note intermédiaire : si tout se passe bien, cinq mains vont collaborer pour cette histoire qui commence, comme d'habitude, n'importe comment. Rassurez-vous, la suite est pire ! Bien pire ! :D

Rouge | 20/12/10 04:15

Mouarffff !!! :D :D Très bon ...

Gzor | 20/12/10 10:11

Tout simplement excellent :D

Gzor.

"Il n'y a pas de Bien et de Mal, il n'y a que le pouvoir et ceux qui sont trop faibles pour le posséder."

Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn!

Kärel | 20/12/10 17:53

[HRP : Magnifique :D ! Excellents traits d'humour.]

Shadee | 21/12/10 18:55

Quelle poésie pour décrire la fin d'une partie d'échecs! :o La suite...se passe de commentaires :D

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